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GROUPE DE TRAVAIL 1997 – réédition 2001 RÉFÉRENTIEL FEMMES-RELAIS C E N T R E D E R E S S O U R C E S

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RÉFÉRENTIEL FEMMES-RELAIS

Tél. : 01 48 09 26 36

Fax : 01 48 20 73 88

E-mail : [email protected]

15, rue Catulienne - 93200 Saint-Denis

ISBN : 2-913125-28-x

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RÉFÉRENTIEL FEMMES-RELAIS

Profession Banlieue

Référentiel réalisé avec l’IRTS de Paris– 1997, réédition 2001 –

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Sommaire

Préface de la réédition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

Historique de la démarche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

Une méthode : l’élaboration d’un référentiel métier. . . . . . . 17Qu’est-ce que la compétence ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17L’intitulé du métier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20Les missions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20Les finalités dans lesquelles s’inscrivent les missions . . . . 21Le niveau d’autonomie et de responsabilité . . . . . . . . . . . 21

Les activités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22ACCUEILLIR – RECEVOIR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23INFORMER – ANIMER . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25ORIENTER . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27ACCOMPAGNER . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28EFFECTUER UNE MÉDIATION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29S’INFORMER – SE FORMER – TRAVAILLER EN ÉQUIPE . . . 30TRAVAILLER EN PARTENARIAT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

Des questions à débattre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33L’intitulé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33L’appartenance au quartier de la femme-relais . . . . . . . . . 34La fonction de traduction, vecteur ou «obligation» ? . . . . 35

En guide de conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37La demande sociale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37Les activités constitutives de la fonction . . . . . . . . . . . . . 38L’éthique liée à ces activités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39La formation et la qualification . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

Annexe – Les associations et les structures partenaires de Seine-Saint-Denis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

L’Association des médiatrices socioculturelles de Pantin . 44L’Arifa, association des femmes-relais de Clichy-sous-Bois et de Montfermeil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46

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Les agents de promotion de la vie sociale de Bondy . . . . 50L’Arc-en-ciel du Londeau à Noisy-le-Sec . . . . . . . . . . . . . 53

Deux résonances actuelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57La médiation sociale et culturelle : émergence et professionnalisation des adultes-relais . . . . . . . . . . . . . . . .Élisabeth Maurel, chercheur en sociologie, GREFOSS–IEP (Grenoble) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59

Des savoirs de l’expérience au métier : l’exemple des femmes-relais . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Élisabeth Dugué, ingénieur de recherche en sociologie du travail, CNAM, rattachée au GRIOT . . . . . . . . . . . . . . 73

Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85

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POURQUOI rééditer le référentielfemmes-relais ? D’une part,parce que ce document nous est

régulièrement demandé, d’autre partparce que la circulaire d’avril 2000 rela-tive aux postes d’adultes-relais entraînela création d’un certain nombre d’em-plois dans les associations qui inter-viennent dans les quartiers de la poli-tique de la ville. L’apparition de ces em-plois exige la mise en place de forma-tions adaptées au contenu des fonc-tions si nous ne voulons pas que, trèsrapidement, ces dernières ne soient dé-tournées de leur objectif initial : per-mettre que la parole circule entre deuxparties, être dans une fonction de «pas-seur» qui se positionne à la fois dans laproximité et dans l’altérité.

Depuis la première édition de ce réfé-rentiel, en 1997, le contexte a évolué,notamment avec la création des em-plois-jeunes et la multiplication defonctions diverses autour de la média-

tion. Un terme quelque peu vaguequi nécessite d’être qualifié si l’onveut connaître les fonctions qu’il re-couvre. Un terme qui nous confirmece que les femmes-relais1 nous rappel-lent depuis maintenant plus dedix ans, que les fonctions de la rela-tion, de la parole, qui nécessitent dutemps, ont été délaissées sur l’autel dela productivité : «Comment passer del’univers du calcul généralisé, qui estcelui du marché, à l’univers de la pa-role, qui est celui des gens qui construi-sent quelque chose en com mun? La mé-diation doit justement être cette poli-tique qui fabrique de la reconnaissanceentre les sujets » (Mi chel Autès2).

Préface de la réédition

1. Dans le titre de la première édition de ce référen-tiel, nous mettions femmes-relais entre guillemets. Ilnous semble que l’avancée de la réflexion sur cettenouvelle fonction et le début de sa reconnaisancenous autorisent à supprimer ces guillemets.2. Cf. Profession Banlieue, 2000, voir bibliogra-phie.

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Luc Carton, philosophe, affirmaitdéjà lors de la Rencontre de Profes-sion Banlieue3 de novembre 1999 surla professionnalisation des femmes-relais que « les savoirs [des femmes-re-lais] sont différents et conflictuels parrapport à un univers masculin que l’onpeut qualifier d’univers des “tempscomptés”. Une part stratégique de l’ex-périence des femmes, du fait précisé-ment du sort qui leur est réservé par leshommes, n’est-elle pas de se trouver aucarrefour des temps ? Elles sont à la foisdans le temps de la professionnalité, dumétier, du salariat, et dans le temps dela communauté, de la collectivité et duvoisinage ».

Nous augmentons l’édition de ce ré-férentiel femmes-relais de deux textesqui nous semblent d’importancedans cette exigence que nous portonsde professionnalisation et de recon-naissance des femmes-relais.

Tout d’abord, Élisabeth Dugué, in-génieur de recherche en sociologie dutravail au CNAM (Conservatoire na-tional des arts et métiers), explore ceque signifierait la reconnaissance desfonctions des femmes-relais commemétier en termes de statut, de forma-tion, de carrière. Elle conclut en di-sant que « les savoirs nés de l’expériencepeuvent permettre de renouveler lesthéories, si les façons de faire sont enrupture avec les pratiques instituées etsi le groupe porteur de ces nouveaux sa-

voirs réussit à s’imposer dans le champprofessionnel. Poser la question de lareconnaissance d’un métier de femmes-relais, c’est aussi se demander si la nais-sance de leur groupe s’inscrit dans unrenouvellement des pratiques d’actionsociale […] ».

Par ailleurs, Élisabeth Maurel, cher-cheur au GREFOSS (Groupe de re-cherche et de formation en politiquessociales), plaide pour une reconnais-sance de la fonction des femmes-re-lais dans un grand corps des profes-sionnels de la proximité. En cela, elleexplore les propos qu’elle avançaitlors de son intervention à la Ren-contre de Profession Banlieue en no-vembre 1999 : « Je crois qu’il faudraitpenser une qualification autour decette légitimité de proximité et de sa-voirs sociaux, qui puisse couvrir un en-semble de fonctions entre lesquelles,d’ailleurs, une carrière professionnellepourrait se dérouler, ou entre lesquellesles personnes pourraient évoluer, afinqu’elles ne soient pas enfermées à viedans un quartier et dans un rôle defemme-relais 4 ».

Mais ce référentiel, outre ce qu’ilnous dit de ce que font les femmes-relais et de ce qui leur est nécessairepour remplir leurs missions, répond

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

3. Ibid.4. Cf. Profession Banlieue, 2000, voir bibliogra-phie.

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à des questions actuelles de sociétédont les enjeux dépassent la profes-sionnalisation des fonctions de lamédiation : «Si l’on parle en termes deréférentiels – et donc de compétences etde qualifications –, il faut réfléchir à ceque signifient des métiers dont la com-pétence essentielle est la relation. C’estun enjeu dans le contexte actuel, mêmesi ce n’est pas nouveau, parce qu’il nesemble pas que le maintien de ce typed’action sociale soit une préoccupationmajeure des politiques publiques. »

C’est aussi pour cela qu’il nous sem-blait important de rééditer ce référen-

tiel femmes-relais qui, rappelons-le, aété élaboré avec l’IRTS-Paris (Ins titutrégional du travail social) et quatre as-sociations de femmes-relais de Seine-Saint-Denis5 : l’Arc-en-ciel du Lon-deau qui intervient à Noisy-le-Sec,l’Arifa à Clichy-sous-Bois et à Mont-fermeil, l’Association des médiatricessocioculturelles de Pantin et les agentsde promotion de la vie sociale deBondy.

Bénédicte MadelinDirectrice de Profession Banlieue

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Préface

5. Cf. en annexe la présentation, en 1997, desquatre associations. Par ailleurs, signalons quel’Afavo, Association des femmes africaines duVal-d’Oise, a accompagné quelque temps legroupe de travail.

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CETTE étude sur le rôle et lafonction des femmes-relaisrésulte d’un processus qui

s’est déroulé en deux étapes :– l’élaboration, avec les chefs de

projet des contrats de ville deSeine-Saint-Denis, de tableaux debord afin de suivre l’état d’avan-cement des actions mises enœuvre dans le cadre des program-mations annuelles et de mesurerles écarts entre les objectifs géné-raux, les objectifs opérationnels etles actions réalisées ; ces tableauxde bord, qui ne sont pas l’évalua-tion des contrats de ville, mais unoutil de pilotage, prennent toutleur sens dans la durée ;

– la mise en place d’un groupe detravail autour d’une action pré-cise afin de vérifier la pertinencede ces outils dans un processusd’évaluation dynamique, partici-pative : un tableau de bord spéci-fique a été réalisé pour les actions

de médiation des femmes-relais,action inscrite dans plusieurscontrats de ville. Il a été élaboréavec l’Arifa, association desfemmes-relais du grand ensemble(Les Bosquets) de Clichy-sous-Bois - Montfermeil et les chefs deprojet des contrats de ville où desactions similaires étaient menées.

Dans un premier temps, le groupe adécliné les différents objectifs annon-cés de l’Arifa :1 – aider à l’autonomisation des

femmes du grand ensemble dansleur vie en France (notion depassage entre deux cultures, avecles compromis nécessaires) ;

2 – contribuer à une meilleureconnaissance et à une bonnecompréhension des populationsétrangères de la part des institu-tions, pour un respect des per-sonnes comme individus singu-liers ;

Historique de la démarche

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3 – promouvoir des femmes étran-gères du quartier dans un rôle demédiation ;

4 – faire reconnaître et valider unenouvelle profession à caractèresocial.

Au regard des quatre objectifs ini-tiaux de cette association, dont lespremières activités datent de 1990, ilest apparu que le troisième, à savoirla promotion sociale et profession-nelle des femmes, n’était pas atteint :si l’observation du fonctionnementde cette association mettait en évi-dence une forte reconnaissance deson travail par la population du quar-tier et par les partenaires institution-nels locaux (hôpital, PMI, Trésor pu-blic, CAF…), voire par les pouvoirspublics ou des délégations étrangères,cela ne se traduisait pas par une re-connaissance en termes de statut pro-fessionnel et donc par une réelle pro-motion en termes de parcours profes-sionnel. Le quatrième objectif decette association, à savoir la recon-naissance et la validation d’une nou-velle profession à caractère social,n’était même pas envisagé.

Fort de ce constat, trois questionspréalables ou connexes se posaient :– être femme-relais, est-ce un mé-

tier, une fonction, un nouveaumétier ?

– quelles sont les garanties pour unfonctionnement des activités de

médiation interculturelle payédurablement et non sur des sub-ventions aléatoires ou sur desemplois aidés ?

– quel peut être le devenir profes-sionnel d’une femme-relais qui,après plusieurs années d’expé-rience, souhaite changer de fonc-tion professionnelle ou est ame-née à changer de lieu d’activité ?

Un nouveau groupe de travail a doncété constitué ; il rassemblait quatreassociations et structures de femmes-relais de Seine-Saint-Denis – la cin-quième, l’Afavo, s’étant jointe plustardivement –, leurs organismes for-mateurs (la Fédération nationaleLéo-Lagrange et FIA-ISM1), la Délé-gation départementale aux droits desfemmes, la Direction départementalede la jeunesse et des sports et l’IRTS-Paris. Ce groupe de travail s’étaitdonné pour objectif la mise en com-mun et l’analyse des différentes pra-tiques concernant la médiation so-ciale et culturelle dans le but de faireremonter au niveau des pouvoirs pu-blics des informations cohérentescontribuant à définir le statut decette fonction : s’agit-il d’un métier,d’une solidarité de voisinage… ?Quel pourrait être le statut desfemmes-relais dans la double inten-

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

1. Femmes Inter-Associations – Inter-Service-Migrants.

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tion de leur garantir des moyens defonctionnement durables et de per-mettre à ces femmes une évolutionprofessionnelle par la reconnaissancede leur activité ?

Le travail du groupe s’articule doncsur la double question de la recon-naissance individuelle et de la recon-naissance collective de la fonction demédiation sociale et culturelle.

Il s’agit de proposer des élémentsconcrets, œuvrant à adapter lesmoyens mis à disposition de cesfemmes, à la hauteur des ambitionsdu discours politique les concernant :en 1993, la création par Simone Veil,de mille contrats emploi-solidaritépour les femmes-relais ; en no-vembre 1996, les propos d’ÉricRaoult, ministre délégué à la Ville età l’Intégration : «Dans beaucoup delieux, ces structures de femmes-relaisont une existence […] qui n’est pasassez reconnue […]. Est-ce qu’elles doi-vent rester en CES, donc à mi-temps,ou faut-il une professionnelle qui soitune tête de réseau ? […] Même si ellen’a pas une professionnalisation recon-nue, une femme-relais doit pouvoir,néanmoins, avoir accès à une fonctionde travailleur social. Il faut que ce dis-positif soit un lieu de passage et non unlieu d’oubli. »

La formulation de préconisationsvise à la reconnaissance d’un disposi-

tif national. Dans cet objectif, la mé-thode retenue était de constituer unréférentiel métier à partir de situa-tions de travail réelles, entre ce quiest prescrit par les « employeurs » etce qui est réalisé par les femmes-re-lais. Il est nécessaire d’analyser ces si-tuations de travail au moyen d’unegrille de questionnement. La dé-marche se traduira par une oscilla-tion permanente entre les expé-riences des différents sites, entre cesréalités et un « idéal » qui représente-rait l’état désiré de fonctionnement.

Il est nécessaire de définir lescontours de ces actions de médiation.Aussi, pour vérifier l’hypothèse selonlaquelle le métier et la qualificationexistent, trois questions doivent êtreposées :– quelles sont les tâches, les carac-

téristiques, les situations clés dece métier ?

– s’agit-il d’une fonction nouvelle,d’une recomposition d’une fonc-tion existante, d’une fonctionpréexistante ? Quelles sont ses ar-ticulations avec les autres métiersdu travail social ?

– quels sont les types d’em-ployeurs, le marché d’emploi decette fonction ?

Il est indéniable que la fonction demédiation nécessite d’être clairementdéfinie et de déterminer les champsd’activités et de compétences des

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Historique de la démarche

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femmes-relais, notamment dans leurrelation avec les institutions et les ha-bitants ; il sera alors nécessaire de vé-rifier que cette fonction constitue unvéritable métier doté d’une éthique.L’objectif premier sera de vérifier lapertinence d’un référentiel métier.Qualification et formation ne ferontpas l’objet d’un développement ap-profondi au sein du groupe de tra-vail, mais ils seront néanmoins abor-dés puisqu’ils sont indissociables duconcept de métier.

De la confrontation des objectifs desstructures associées à ce travail, il res-sort quatre finalités attribuées à lafonction de femme-relais :1 – permettre que chaque individu

connaisse ses droits et ses devoirsafin d’être acteur à part entièredans la vie sociale et d’acquérirson autonomie dans la sociétéfrançaise ;

2 – créer le contact, le dialogue entreles cultures ;

3 – promouvoir la vie sociale : créerdes liens de solidarité et romprel’isolement ;

4 – prévenir l’exclusion sociale en as-surant l’expression des habitantset en favorisant une culture d’ini-tiative.

Dès l’origine de la réflexion, deuxorientations se sont présentées :l’IRTS-Paris propose une formationorientée vers la vie sociale et la Direc-

tion régionale de la jeunesse et dessports (DRJS) une formation orien-tée vers l’animation locale. La Fédé-ration nationale Léo-Lagrange in-dique que son organisme de forma-tion a établi une demande d’agré-ment pour un BÉATEP2 option« agent de promotion de la vie so-ciale » auprès de la DRJS. FIA-ISMélabore une charte de la médiation ausein de son réseau de formation.

Il existe donc un certain nombre denuances dans les objectifs des di-verses associations de médiatrices in-terculturelles, et les programmes deformation suivis.

La présence de l’IRTS-Paris se justifieau même titre que celle de la DRJSou de la Délégation départementaleaux droits des femmes. Si cet orga-nisme développe des formations, il estinterpellé par le groupe pour sa capa-cité à définir un programme de réfé-rence, non pour l’instrumentaliser.

Profession Banlieue, pour sa part, n’apas vocation opérationnelle, maisconstitue un lieu d’échanges et de ré-flexion.

Le groupe de travail a été co-animépar l’IRTS-Paris et Profession Ban-

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

2. Brevet d’État d’assistant technique d’éduca-tion populaire.

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lieue. Les résultats des travaux qui ysont menés représentent le bien com-mun des participants. ProfessionBanlieue, maître d’ouvrage dugroupe de réflexion, sera également

maître d’œuvre de son portage au-près des décideurs sous une forme àdéfinir en commun (note de syn-thèse, charte, journée de ren-contre…).

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Historique de la démarche

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AFIN d’aborder les questionsposées par le groupe de tra-vail notamment quant à la

reconnaissance individuelle et collec-tive de cette activité, il est nécessaired’établir un préalable : l’élaborationd’un référentiel qui permettrait de re-pérer les tâches caractéristiques et lescompétences mises en œuvre parcette fonction de femmes-relais.

Pour ce faire, nous nous sommes ap-puyés sur les travaux de la mission«Nouvelles qualifications » pour la-quelle l’expression d’une attente entermes de compétences nouvellesdoit être analysée. Il convient alors dedéfinir les conditions d’exercice decompétences en situation de travail,donc d’appréhender les activitésconfiées ou susceptibles d’êtreconfiées.

Il nous fallait alors élucider une autrequestion, celle de la compétence.

QU’EST-CE QUE LA COMPÉTENCE?

Nous pouvons en trouver une défini-tion dans Développement et emploi :étude sur les critères d’évaluation desdispositifs publics de formation à fina-lité d’insertion de Dominique Thierryet Dominique Moraine (juillet 1996),qui retient deux idées majeures sur lacompétence :

• « L’articulation étroite de lacompétence et de l’activité ; lacompétence est en effet insépa-rable de l’action et elle ne peutvéritablement être appréhendéequ’au travers des activités parlesquelles elle s’exprime et dontelle permet la mise en forme ;cette articulation étroite ne si-gnifie pas que la compétence est“prisonnière” de l’activité, elleindique simplement que lacompétence s’exprime de ma-

Une méthode : l’élaboration d’un référentiel métier

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nière spécifique en fonction descontingences de la situation etdu but que poursuit l’activité ;

• La compétence est composéed’un ensemble d’éléments en in-teraction dynamique les uns parrapport aux autres : connais-sances, savoir-faire pratiques, sa-voir-faire relationnels, etc. Leterme de “combinaison”, utilisépar Viviane de Landsheere, in-dique qu’une compétence àl’œuvre est un ensemble d’élé-ments structurés entre eux defaçon complexe et susceptibled’être décomposé.

Ainsi :

• La compétence possède undouble caractère opératoire et fi-nalisé : elle n’a de sens que parrapport à l’action – elle est tou-jours “compétence à agir” – et aubut que poursuit cette action ;elle est donc indissociable del’activité par laquelle elle se ma-nifeste ; Jacques Leplat (1991)insiste sur un aspect particulier :“Le concept de compétence doittoujours être précisé : on est‘compétent’ pour une tâche ouun ensemble de tâches.” Dans lemême ordre d’idée, il est néces-saire d’ajouter que la forme queprend la compétence est toujourscontingente, c’est-à-dire relative

à une situation rencontrée, tirantparti des différents éléments decette situation pour permettre àl’individu de s’y adapter, ou plusexactement de s’adapter à sesconditions évolutives ;

• La compétence est apprise(Jacques Leplat). On n’est pasnaturellement, spontanémentcompétent, on le devient par uneconstruction sociale qui combinedes apprentissages théoriques etdes apprentissages expérientiels ;

• La compétence est structurée :elle combine, reconstruit defaçon dynamique les différentséléments qui la constituent (sa-voirs, savoir-faire pratiques, rai-sonnement…) pour répondre àdes exigences d’adaptation, enfonction de la réalisation d’unobjectif ;

• La compétence est une notionabstraite et hypothétique. Elleest par nature inobservable : cequ’on observe ce sont les mani-festations de la compétence. Cesmanifestations sont, selon nous,de trois natures : la performance,le comportement, l’activité. »

Ainsi, une compétence ne se penseque par rapport à une situationd’évaluation, celle-ci étant la situa-tion de travail. Appréhender les com-

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

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pétences n’est donc possible qu’enanalysant préalablement la situationle travail. Nous avons développécette analyse à partir de situations detravail réelles, entre ce qui est prescritpar les « employeurs » et ce qui estréalisé par les femmes-relais. Ainsi, ladémarche se traduira par une oscilla-tion permanente entre les expé-riences des différents sites, entre cesréalités et un « idéal » qui représente-rait l’état désiré de fonctionnement.

Le référentiel est un descriptif quis’appuie sur l’analyse du travail partous les acteurs ; en l’occurrence, pournotre groupe de travail, il s’agit defemmes-relais, de leur responsable, deleur employeur et de leur formateur.

Plus qu’un référentiel, nous pouvonsparler d’un référentiel métier, si l’onse réfère aux définitions suivantes duterme métier :

• Dans le rapport du groupe detravail du Conseil supérieur dutravail social (CSTS) de dé-cembre 1995, L’Image des tra-vailleurs sociaux, on peut lire :«Le mot est, à l’origine, l’expres-sion populaire pour désigner le“ministère”, en latin “ministe-rium”, c’est-à-dire la formation duministre ou du serviteur de lachose publique. À l’époque chré-tienne, le sens s’étendra au “servicedivin” par un croisement avec le

mot “mysterium”, mystère. À par-tir du XIIe siècle, le terme de “mé-tier” s’est appliqué à l’exerciced’une activité rémunérée ou d’unart, on parle par exemple du mé-tier des armes.La locution “des gens de métiers”désigne alors ceux dont le métierexige des connaissances, c’est-à-direles lettrés, avant de prendre le sensd’artisans puis d’ouvriers entre leXVe et le XVIe siècle.Actuellement, les termes de métiersmanuels ou intellectuels renvoientà l’idée d’expérience de maîtrise oud’habileté, par rapport à des sa-voirs ou à des savoir-faire : l’expres-sion “avoir du métier” comprenantune connotation très positive.Le métier se distingue des activitésbénévoles et présente certains attri-buts en termes de savoir-faire et desavoir être. »

• Pour Élisabeth Bautier1 : «L’op-position profession/métier, telle quedécrite par François Aballéa, metl’accent sur l’importance de la di-mension idéologique dans la sub-stitution actuelle d’un terme àl’autre. Le “métier” renvoie à del’individuel, à du savoir-faire trèscontextualisé, homogène et repo-sant sur l’empirique, la pratique.

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Une méthode : l’élaboration d’un référentiel métier

1. Paroles et pratiques sociales, n° 48, octobre-dé-cembre 1994.

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Une profession se distingue d’unmétier en ce qu’elle est professée ;dès lors, elle est, en formation, liéeà une démarche d’intellectualisa-tion, de rationalisation qui per-met un apprentissage par trans-mission et non seulement parimitation, imprégnation, appren-tissage sur le tas. »

Ainsi, notre groupe de travail se posepour objectif premier de définir unréférentiel métier, afin de validerl’hypothèse que nous sommes face àun métier en cours de constitution.

Pour élaborer ensemble ce référentiel,nous nous sommes attachés à analy-ser des situations de travail par lequestionnement : qui fait quoi ?comment ? pourquoi ?

Plus précisément, notre questionne-ment a porté sur les points suivants :1 – quel est l’intitulé du métier ?2 – comment se définit la mission ?3 – quelle est la finalité de la mis-

sion ?4 – quelles sont les conditions

d’exercice, de réalisation ? Quelleest l’éthique de ce métier ?

5 – quelles sont les activités princi-pales et quel pourcentage detemps chacune représente-t-elle ?

6 – quelles compétences sont re-quises ?

L’INTITULÉ DU MÉTIER

Cette étape de notre questionnementa fait l’objet de nombreux débats ausein du groupe de travail ; en effet,quatre termes sont employés : femme-relais, médiatrice socioculturelle, agentde développement social et agent depromotion de la vie sociale.

Chacune de ces dénominations rendautant compte de l’histoire dechaque groupe que de la représenta-tion qu’il se fait de la fonction.

Néanmoins, nos débats (voir infra,«Des questions…») ne nous ont paspermis de dégager un intitulé quifasse l’unanimité et cette questionreste en suspens.

LES MISSIONS

C’est le but général, la responsabilitéconfiée à quelqu’un. Ces missionssont définies par les employeurs desfemmes-relais.

Auprès des populations bénéficiaires

Femmes et leur famille, étrangères,françaises ou issues de l’immigration,exprimant une demande d’aide face àune difficulté qui peut être passagère,d’ordre linguistique, social…

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

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Une méthode : l’élaboration d’un référentiel métier

Les femmes-relais réalisent les mis-sions suivantes :1 – être, à la demande de la per-

sonne ou des institutions, unintermédiaire, voire un facilita-teur entre différents interlocu-teurs (administrations, orga-nismes sociaux, écoles, méde-cins, commerces, employeurs,secteur privé…) ;

2 – permettre à la personne de fairereconnaître ses droits ;

3 – favoriser la reconnaissance de lapersonne dans son identité, sonhistoire personnelle, ses savoirsspécifiques ;

4 – favoriser l’écoute et la prise encompte de la personne de lapart des institutions ;

5 – faire connaître aux populationsconcernées les exigences et lescontraintes des institutions.

LES FINALITÉS DANS LESQUELLES S’INSCRIVENT LES MISSIONS

1 – permettre à chaque individu deconnaître ses droits et ses de-voirs, afin d’être acteur à partentière dans la vie sociale etd’acquérir son autonomie dansla société française ;

2 – favoriser le dialogue entre lescultures ;

3 – promouvoir la vie sociale (favori-ser des liens de solidarité etrompre l’isolement) ;

4 – prévenir l’exclusion sociale en as-surant l’expression des habitants(emploi, logement, santé, cul-ture, environnement, loisirs…)et en favorisant une culture d’ini-tiative.

LE NIVEAU D’AUTONOMIE ET DE RESPONSABILITÉ

Au sein des associations, il se dégagequatre niveaux de responsabilité :1 – la femme-relais, qui établit la

pertinence d’un accompagne-ment individuel et qui choisitcollectivement et/ou avec la co-ordinatrice de mener l’accompa-gnement ;

2 – la coordinatrice, qui régule lesdécisions individuelles et gèrel’organisation du travail ;

3 – la responsable (directrice, chef deservice, responsable du person-nel), qui sert de recours, qui ar-bitre lors que cela est nécessaire etqui joue un rôle important pourle maintien de la cohérence dugroupe ;

4 – le maire ou la présidente de l’as-sociation, qui assume en dernierrecours la responsabilité juri-dique des actions engagées.

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LES ACTIVITÉS

Dans le cadre des missions définiesprécédemment, les femmes-relaisexercent un ensemble d’activités :1 – accueillir et recevoir ;2 – informer et animer ;3 – orienter ;4 – accompagner ;

5 – effectuer une médiation ;6 – s’informer, se former, travailler

en équipe ;7 – travailler en partenariat.

À partir de ces activités, nous pou-vons établir le référentiel de compé-tences afférent, présenté dans lesfiches qui suivent.

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

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CONDITIONS DE RÉALISATION

Les associations et les structures de femmes-relais mettent en place des per-manences qui répondent aux besoins de la population et qui se définissent selonles différents points suivants :

• Le lieu :

– permanence dans leur local d’accueil,– permanence dans une institution publique (hôpital, PMI…).

• Le temps :

– en continu dans leur local, tous les jours de la semaine,– ponctuellement dans les lieux institutionnels.

• L’objet de la demande:

– au local d’accueil : demande polyvalente qui émerge et se précise grâce à unerelation de confiance, de proximité et de disponibilité,

– dans les institutions : la femme-relais va au-devant de la personne en attentede consultation ou de rendez-vous, pour l’aider dans ses rapports avec l’ins-titution. Elle peut animer des groupes thématiques en salle d’attente.

L’organisation de la permanence s’effectue, dans la majorité des associations etdes structures, sous l’autorité d’une responsable coordinatrice.

L’accueil représente 100 % du temps de l’accueillante ou 50 % du temps de travailquand il est assuré alternativement par chacune des femmes-relais.

COMPÉTENCES

• Pour écouter :

– connaître la culture et la langue,– parler la même langue,– instaurer une relation de confiance,– être dans l’empathie et la distanciation,– respecter la parole de l’autre.

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Une méthode : l’élaboration d’un référentiel métier

1. Accueillir – Recevoir

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

• Pour analyser la demande:

– connaître la culture et le quartier (les conditions de vie, les événements…),– effectuer un décodage culturel,– évaluer les priorités,– reformuler,– temporiser,– objectiver.

• Pour prendre en compte les demandes recevables au regard desdroits de la personne :

– connaître les notions de base administratives et juridiques,– connaître les partenaires locaux,– expliquer et expliciter les droits élémentaires,– respecter la confidentialité,– respecter une éthique.

• Pour traiter directement la demande:

– connaître les informations de base administratives et juridiques,– rechercher les informations,– remplir un dossier, un questionnaire administratif délivré à la personne,– être en relation avec les différents interlocuteurs institutionnels locaux,– être ancré socialement dans la vie de la cité.

• Pour prendre des rendez-vous :

– connaître les interlocuteurs institutionnels,– entretenir et maintenir des relations avec les partenaires,– établir un carnet d’adresses,– savoir argumenter,– savoir utiliser le téléphone,– s’exprimer clairement.

APTITUDES

– être accueillante, disponible, discrète, patiente, ouverte, tolérante, sociable,– avoir une bonne maturité,– faire preuve de tact et de diplomatie,– être rigoureuse et efficace,– être convaincante.

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CONDITIONS DE RÉALISATION

• Les femmes-relais peuvent gérer, dans le cadre de leur associationou de leur structure, à la fois :

– les informations individuelles,– les informations collectives auprès de groupes.

Les informations collectives sont évaluées pour 6 à 8 % du temps de travail.

COMPÉTENCES

• Pour donner les premières informations en réponse à des ques-tions posées par différents publics (individus, organismes…):

– connaître les bases administratives et juridiques,– actualiser ses connaissances,– formuler l’information en adéquation avec le niveau de la personne,– s’exprimer clairement.

• Pour indiquer les moyens appropriés à l’accomplissement des dé-marches :

– connaître les notions de base administratives et juridiques,– connaître l’environnement du quartier,– évaluer le niveau d’autonomie de la personne (mobilité, compréhension et

expression),– organiser les démarches dans le temps,– expliquer les démarches en fonction des situations,– donner des repères et des conseils.

• Pour organiser les réunions d’information, de sensibilisation etd’échanges en partenariat avec des intervenants extérieurs :

– anticiper la demande,– être à l’écoute des préoccupations des habitants, de leurs questions,– connaître les thèmes à aborder,– susciter et stimuler l’intérêt, mobiliser les habitants,– organiser et préparer une réunion avec les intervenants,

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Une méthode : l’élaboration d’un référentiel métier

2. Informer-Animer

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

– animer et reformuler,– participer au compte rendu de la réunion.

• Pour favoriser une dynamique locale :

– connaître les réseaux locaux et avoir un bon ancrage dans la vie de la cité,– repérer les besoins des habitants,– mettre en relation les habitants avec les réseaux locaux.

APTITUDES

– être patiente, accueillante, disponible,– être organisée,– faire preuve de discernement.

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CONDITIONS DE RÉALISATION

Parfois, et selon la capacité d’autonomie de la personne, ces orientations sontréalisées avec un accompagnement individuel.Les femmes-relais peuvent éventuellement assurer un suivi. Ce suivi peut êtreréalisé à l’initiative de la femme-relais ou en fonction des demandes et des be-soins des personnes.

COMPÉTENCES

• Pour mettre les personnes en relation avec les institutions ou lespersonnes compétentes :

– instaurer une relation de confiance et de réassurance,– connaître les institutions et leurs représentants (identifier leurs compé-

tences et leurs limites, cibler le bon interlocuteur),– repérer les limites de sa fonction,– préparer la personne à l’échange avec son nouvel interlocuteur et aux exi-

gences liées à cette rencontre,– savoir passer le relais,– responsabiliser l’autre,– savoir faire confiance.

• Pour assurer le suivi :

– connaître les cheminements administratifs,– mettre en place les outils afin de mémoriser les situations (carnet de liaison,

dossier…),– échanger en équipe,– évaluer l’évolution de la situation,– relancer les personnes.

APTITUDES

– être organisée et attentive,– avoir de la mémoire.

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Une méthode : l’élaboration d’un référentiel métier

3. Orienter

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CONDITIONS DE RÉALISATION

Tout accompagnement est réalisé dans les règles de la confidentialité.

L’accompagnement individuel représente 30 à 50 % du temps de travail des femmes-relais selon les associations ou les structures.

COMPÉTENCES

• Pour être avec la personne dans ses démarches :

– connaître les usages et en informer la personne,– évaluer la mise en place de l’accompagnement selon différents critères (per-

sonnes non francophones, isolées ou en situation de crise…),– préparer les déplacements avec la personne en visant son autonomie,– préparer le rendez-vous (préparer le dossier technique ou administratif, ex-

pliciter la demande et travailler l’argumentation avec la personne, situer lademande dans le cadre administratif ou législatif français),

– respecter la place de la personne.

• Pour faciliter le lien et la communication entre les personnes etles institutions :

– connaître et informer sur les normes et les usages,– être familiarisée avec le vocabulaire des acteurs sociaux,– veiller à ce que la personne prenne sa place activement dans l’inter-relation,

et faciliter son expression.

• Pour articuler les interventions avec les acteurs sociaux selonleurs champs d’intervention :

– connaître les champs d’intervention des acteurs sociaux,– spécifier les limites de chacun.

APTITUDES

– être mature, – être souple et persévérante.

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

4. Accompagner

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CONDITIONS DE RÉALISATION

Cette activité est transversale aux activités précédemment décrites.

COMPÉTENCES

• Pour reformuler afin de favoriser la compréhension réciproquedes codes, schémas et références sociaux et/ou culturels :

– connaître les codes, les schémas et les références sociaux et/ou culturels,– apporter des éclairages culturels,– veiller à la qualité de la communication (apaiser les tensions, dédramatiser,

relativiser…),– aller à l’essentiel,– réassurer.

• Pour traduire et/ou interpréter (si nécessaire) :

– être au minimum bilingue (lu, parlé),– écrire en français.

• Pour négocier, rechercher un compromis :

– connaître ses interlocuteurs,– connaître les bases administratives et juridiques,– gérer des conflits avec des administrations, ou des conflits de voisinage, en

informant et en faisant des propositions,– veiller à la qualité de la communication et dédramatiser des tensions,– veiller à ce que la personne prenne sa place activement dans l’inter-relation,– conserver une neutralité, une distanciation,– objectiver.

APTITUDES

– être maître de soi,– faire preuve de discernement,– être objective,– être mature.

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Une méthode : l’élaboration d’un référentiel métier

5. Effectuer une médiation

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CONDITIONS DE RÉALISATION

– réunions d’équipe hebdomadaires (responsable et femme-relais) :• bilan de la semaine,• organisation du travail,• ajustement des missions,

– réunion mensuelle d’analyse des pratiques ou groupe de réflexion,– formations ponctuelles selon les besoins et les opportunités, afin d’élargir

ses connaissances pour une meilleure pratique.

Ces activités occupent 12 % du temps des femmes-relais.

COMPÉTENCES

• Pour s’informer auprès de professionnels :

– réactualiser ses connaissances auprès des partenaires,– choisir ses intervenants.

• Pour se former sur différents thèmes :

– approfondir ses connaissances,– impliquer les partenaires dans la formation des femmes-relais,– analyser ses propres besoins en formation.

• Pour échanger et analyser ses pratiques :

– approfondir ses connaissances sur soi et dans sa relation à l’autre,– rendre compte de ses activités,– transmettre et s’approprier réciproquement les connaissances,– utiliser les compétences complémentaires dans un travail d’équipe.

APTITUDES

– se remettre en question.

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

6. S’informer – Se former – Travailler en équipe

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CONDITIONS DE RÉALISATION

Les femmes-relais peuvent être impliquées dans trois niveaux de partenariat :

• Le partenariat institutionnalisé

Les femmes-relais participent à des commissions de travail pluridisciplinairesavec des élus, des collectivités locales et territoriales. Les commissions consti-tuent des lieux de concertation, de collaboration, de mise en valeur des pro-blèmes de terrain, et de décision.

• Le partenariat d’acteurs

Avec des travailleurs sociaux, des médecins, des enseignants, des associations,des établissements et les services publics (RATP, EDF, Trésor public, LaPoste…).Les femmes-relais définissent avec ces différents acteurs des modalités d’inter-vention dans une situation donnée. Femmes-relais et acteurs s’interpellent ré-ciproquement dans leur champ de compétence respectif.

• Le partenariat financier

La mise en œuvre de partenariat institutionnel ou de partenariat d’acteursn’implique pas pour autant un partenariat financier, mais le favorise.

Ce temps de travail est évalué entre 6 à 8 % selon les associations et les structures.

COMPÉTENCES

• Pour participer à des commissions de travail pluridisciplinaires :

– connaître les interlocuteurs (leurs missions, leurs objectifs, leurs fonc-tions…),

– connaître le fonctionnement de ces commissions,– être ancrée dans la vie de la cité,– apporter et échanger des éléments de connaissance sur les habitants et

leur environnement,– savoir se présenter, se faire connaître et reconnaître,– prendre la parole en réunion.

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Une méthode : l’élaboration d’un référentiel métier

7. Travailler en partenariat

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• Pour définir avec différents acteurs des modalités d’intervention :

– connaître les limites du travail de chacun et reconnaître le travail de l’autre,– connaître les limites de sa fonction,– mobiliser les réseaux professionnels et les réseaux de proximité.

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L’INTITULÉ

Femme-relais, médiatrice sociocultu-relle, agent de développement social etagent de promotion de la vie socialesont les quatre termes employés enSeine-Saint-Denis.

Si le terme femme-relais semble in-approprié, il est indéniable que c’estun terme qui a fait école. Les média-trices et les agents de promotion de lavie sociale reconnaissent que ces deuxtermes sont perçus comme froids ettechniques, imposent une certainedistance (« ça fait grand titre ») et nepossèdent aucune signification pourla population, qui les nomme ordi-nairement femmes-relais.

Le terme de femme-relais peut pa-raître inapproprié, puisqu’il renvoie àune féminisation de cette fonction aumoment de l’émergence des hommesdans la médiation ; mais le mot relais

est important, car il symbolise la no-tion de passage, de transmission,dans ce travail qui n’est pas celui d’untravailleur social (les femmes-relaisn’interviennent ni au niveau desprestations légales ni sur des mesureséducatives, par exemple). Il véhiculedes notions de proximité, d’huma-nité, d’affectivité. Il semble être passéparmi la population comme parmiles institutions.

Le terme agent heurte la population,mais aussi, et peut-être surtout, lesintéressées elles-mêmes, par saconnotation administrative, tech-nique, plutôt que par son acceptionfonctionnelle avancée par l’orga-nisme de formation. Ce terme nepossède en outre aucune significationpour la population qui parle commu-nément de femmes-relais.

Le terme médiatrice perd de son senset nécessite d’être qualifié : médiateur

Des questions à débattre

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interculturel, médiateur pénal, mé-diateur de quartier, médiateur cultu-rel, médiateur du livre, etc. ; il ren-voie par ailleurs à des niveaux de for-mation plus élevés. Cependant, ceterme rend bien compte de la notionde conflit ou d’incompréhensionpropre aux situations de médiation.Il ne fait néanmoins pas ressortir lafonction d’animation autant quecelui de promotion.

Femmes-relais, agents de promotion dela vie sociale, agents de développement,autant de termes qui insistent sur leprocessus de transformation auquelces femmes participent, par rapportau quartier et par rapport à elles-mêmes.

L’APPARTENANCE AU QUARTIER DE LA FEMME-RELAIS

La notion de proximité est-elle trans-férable d’un quartier à un autre, ou levécu du quartier prime-t-il de façonabsolue ? Cette question est essen-tielle, car elle conditionne les possibi-lités de mobilité professionnelle desfemmes-relais.

Les femmes-relais présentes onttoutes été recrutées en fonction deleur connaissance de leur quartier etdu réseau de sociabilité qu’elles ypossèdent. Elles affirment que se si-

tuer en tant qu’habitante donne desliens de confiance plus forts dans leregard que leur portent les habitants.Pour autant, elles reconnaissent que,en ce qui concerne les éducateurs derue, pour lesquels les notions deproximité et de confiance sont toutaussi essentielles, le vécu sur le quar-tier ne constitue pas un prérequisexigé. Tout au plus, la durée del’adaptation varie et se fait pluslongue. Dans ce cas, les savoirs peu-vent compenser le vécu commun. Deplus, certaines femmes-relais ont dûdéménager, quitter le quartier : carcette proximité peut rapidement setransformer en un envahissement dela vie privée du fait de sollicitationscontinuelles à toute heure du jour oude la nuit.

L’Arifa affirme sa philosophie de re-cruter les femmes-relais dans le quar-tier pour permettre, par la suite, uneévolution vers d’autres fonctions. Ils’agit donc de passer de compétencesindividuelles, dont les relations deproximité permettent la mise en va-leur, à la reconnaissance d’un profes-sionnalisme.

Les relations de proximité permet-tent effectivement une plus grandecompréhension, une empathie desfemmes-relais à l’égard des femmesqu’elles rencontrent, car elles possè-dent généralement des parcours devie comparables. En retour, la proxi-

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

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Des questions à débattre

mité et la connaissance partagée decertaines difficultés provoquent unsentiment de sécurité, de confiancechez les femmes qui ont recours auxfemmes-relais.

Ainsi, l’appartenance au quartier nedoit pas être considérée comme unfacteur restrictif, mais comme unplus, un facilitateur relationnel, quine saurait cependant être à lui seulsuffisant, car la reconnaissance insti-tutionnelle des femmes-relais passeranécessairement par la possibilité deleur mobilité professionnelle.

Il est fait l’hypothèse que, plus que laproximité, la notion de vécu com-mun, de « trajectoire de vie » sem-blable constituerait un fondementessentiel dans l’exercice de la fonc-tion de femme-relais.

LA FONCTION DE TRADUCTION, VECTEUR OU «OBLIGATION»?

La multiplication des interprètesdans les services publics, se récla-mant souvent de la médiation, nous

oblige à interroger la place qu’oc-cupe la fonction de traduction.L’appartenance à une communautéd’origine est-elle un point d’ancrageobligé, un facilitateur de la média-tion ?

Les réflexions du groupe de travailapportent un éclairage sur ce qui pa-raît être la véritable fonction trans-versale : la médiation culturelle,entre les personnes et l’administra-tion, comme de l’administrationvers les personnes. Il s’agit bien d’unprocessus de médiation plutôt quede traduction, puisqu’il existe desfemmes-relais pour des personnesfrançaises d’origine et que de nom-breux immigrés sont francophones.Les femmes-relais insistent sur lefait que, dans des situations destricte traduction littérale, celle-cine peut se faire dans un climat deconfiance que du fait du travail ex-plicatif réalisé en amont et en aval ;ce qui constitue une grande diffé-rence entre médiation et interpréta-riat. À la différence d’un interprète,une femme-relais ne semble paspouvoir exercer en libéral, être indé-pendante d’un groupe investi sur unterritoire donné.

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IL est légitime de s’étonner desremous que pose la reconnais-sance des femmes-relais comme

nouveau métier issu des quartiers etde la politique de développementsocial urbain. Cela rappelle les diffi-cultés rencontrées par les éducateursde prévention spécialisée dont la re-connaissance, il y a une trentained’années, a été saluée par de mul-tiples protestations. Qui, aujour-d’hui, aurait l’idée que leur fonc-tion, leur mission, leur métier nesont pas justifiés ?

Afin de mieux appréhender les diffé-rents éléments de réponse à la ques-tion initiale : «Femmes-relais, un mé-tier, une fonction, une solidarité devoisinage ? », il est nécessaire de rap-peler les éléments constitutifs del’émergence d’un métier :1 – la demande sociale,2 – les activités constitutives de la

fonction,

3 – l’éthique liée à ces activités,4 – la formation et la qualification.

LA DEMANDE SOCIALE

Face à l’émergence de nouveaux be-soins sociaux, il paraît nécessaire departir de la demande et non de l’offreproposée. L’analyse des activités descinq associations et structures parte-naires de ce travail montre que c’esten réponse à une demande que sesont développées les actions de mé-diation, quelle que soit l’histoire sin-gulière de chaque association. Ilconvient d’interroger les élémentsconstitutifs de cette demande. S’agit-il d’une nouvelle fonction révélée parl’aggravation des difficultés écono-miques et sociales, par l’affaiblisse-ment des relations et des solidaritéslocales, ou plutôt par une redéfini-tion des missions des travailleurs so-ciaux ?

En guise de conclusion…

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La demande est double :– une demande exprimée par les

habitants des quartiers, en par-ticulier par les femmes, pourune aide ponctuelle au départ etqui s’est peu à peu diversifiée etcomplexifiée ;

– une demande des institutions etdes services publics (hôpital,PMI, bureau de poste, Trésorpublic, assistantes sociales,écoles…) qui ont très vite me-suré l’intérêt de cet apport desfemmes-relais/médiatrices.

La pertinence de l’intervention desfemmes-relais de l’Arifa estd’ailleurs l’objet d’une évaluationauprès des commanditaires de cetteassociation1, avec pour objectif demesurer leur degré de satisfaction –quantitatif et qualitatif – sur le ser-vice rendu.

Le renouvellement annuel des fi-nancements n’est-il pas aussi lesigne de la reconnaissance de l’acti-vité conduite par les femmes-relais,et donc une légitimation de leurmission, comme l’est le statut déro-gatoire accepté par la préfecture deSeine-Saint-Denis pour les agentsde promotion de la vie sociale deBondy, dont la spécificité de la mis-sion a justifié leur statut de contrac-tuelles municipales ?

LES ACTIVITÉS CONSTITUTIVES DE LA FONCTION

Le travail d’analyse des pratiques desdifférentes associations a mis en évi-dence que cette fonction pouvait sedéfinir par des activités profession-nelles :– accueillir et recevoir,– informer,– orienter,– accompagner,– travailler en partenariat,– travailler en équipe/se former.

Il est intéressant de noter que, quelleque soit l’histoire des associations etdes structures, les charges horairesentre les différentes activités sontcomparables de l’une à l’autre :– 25 % de permanences collectives

(hôpital, école, PMI, bureau deposte…),

– 30 % d’accompagnement indivi-duel pour les associations ayantdémarré leurs activités sur desanimations collectives en direc-tion des femmes du quartier, jus-qu’à 50 % pour les associationsayant dès l’origine débuté parune activité de médiation,

– 15 % pour les animations collec-tives : séance d’information sur

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1. Cf. Maria Cunha, voir en bibliographie.

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les sujets d’actualité immédiateet sur des questions qui préoccu-pent les habitants,

– 10 % pour la formation et la ré-gulation des équipes.

Il existe donc des constantes quinous ont permis de définir le réfé-rentiel métier que l’on trouve dansles pages précédentes.

Mais ce « nouveau métier » peut-ils’inscrire dans la durée ? Aux diffé-rents arguments qui s’opposent à sareconnaissance, à savoir qu’il ne se-rait que passager, les travaux dugroupe de travail et l’analyse del’évolution économique et socialedes populations les plus fragilisées, levieillissement de la population ou lerenforcement de la ségrégation spa-tiale par exemple, rappellent que lafonction de médiation se transfor-mera, comme d’autres métiers dutravail social, mais perdurera. Qui,aujourd’hui, pourrait affirmer queles modes d’intervention des assis-tantes sociales dans les années cin-quante et autour de 1995 sont lesmêmes ? Actuellement, les femmes-relais ne répondent pas seulementaux difficultés des femmes immi-grées, mais s’adressent également auxfemmes françaises. L’interprétariat,qui ne se réduit pas à la traduction,est un outil au service de la média-tion interculturelle, il ne saurait enêtre l’objet.

L’ÉTHIQUE LIÉE À CES ACTIVITÉS

Le groupe de travail n’a pas travaillédirectement sur la question del’éthique, si ce n’est à partir des apti-tudes requises pour les femmes-relaiscomme la discrétion, la confidentia-lité, la neutralité, la distanciation parexemple. Mais l’éthique – et la déon-tologie professionnelle qu’elle sous-tend – a été une préoccupation ré-currente des débats entre les diffé-rentes associations et sera égalementétudiée dans le cadre de l’évaluationdes activités de médiation mises enœuvre par l’Arifa.

La reconnaissance des femmes-relaissignifie une définition, voire un ca-drage de leurs missions, et donc unecertaine rigidification de leur « acti-vité de proximité ». Cet aspect essen-tiel réside dans la nécessité que l’ac-tion de la femme-relais soit baliséedans un système de rétrocontrôle surses propres pratiques. La confianceétablie ne peut se maintenir qu’à lacondition que la femme-relais setienne dans le rôle neutre et distan-cié qui lui confère son autorité mo-rale. Elle assurerait ainsi un rôled’objectivation entre des positionsdifférentes, un rôle de médiation. Lafemme-relais doit être dans la proxi-mité et la distance aussi bien avec lesusagers qu’avec les institutionsconcernées.

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En guise de conclusion

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Dès qu’il y a professionnalisation, il ya institutionnalisation. Quelles nou-velles formes de travail faut-il définirpour garantir cette fonction de proxi-mité et de facilitateur relationnel entreles institutions et les personnes lesplus en difficulté ?

Le positionnement des femmes-relaisreste en suspens dans certaines situa-tions. En cas de carence des tra-vailleurs sociaux de secteur notam-ment, jusqu’à quel stade une femme-relais doit-elle s’impliquer dans la ré-daction d’un dossier de demande deRMI par exemple? S’il est clair quel’enquête sociale ne relève pas de sacompétence, il existe une pression deshabitants qui inciterait à répondre àtoutes les demandes, ce qui se traduitpar la nécessaire capacité des femmes-relais à sérier les problèmes au stade del’accueil et à mesurer les besoins d’ac-compagnement.

Toutes ces questions concrètes, toutesces tensions auxquelles seront sou-mises les femmes-relais poseront, àterme, la question de leur rattache-ment institutionnel – une association,une circonscription d’action sociale ?–, mais détermineront aussi leur pos-sibilité de construire un parcours depromotion professionnelle.

Des organismes comme FIA-ISM ontélaboré une charte des médiatrices in-terculturelles qui reprend les différents

éléments constitutifs d’une éthiqueprofessionnelle, en particulier dans sesarticulations avec les partenaires duchamp social, éducatif ou de la santé :«Dans le contexte actuel où le processusd’exclusion et de marginalisation est àl’œuvre, les médiatrices travaillent à éta-blir ou à rétablir une communicationde proximité qui met en relation diffé-rents acteurs dont les habitants. Dans cecadre, elles souhaitent instaurer un tra-vail partenarial avec des professionnelsqui éprouvent la nécessité de se ques-tionner pour faire évoluer leurs pra-tiques. »

LA FORMATION ET LA QUALIFICATION

Formation et qualification font l’ob-jet d’une réflexion menée par diffé-rents partenaires institutionnels : leministère de la Jeunesse et des Sports,l’Éducation nationale, le ministèredu Travail et des Affaires sociales, leministère de l’Aménagement du ter-ritoire, de la Ville et de l’Intégration,le FAS.

Ces deux éléments n’ont pas fait l’ob-jet d’un développement approfondi ausein du groupe de travail, mais ils ontnéanmoins été abordés – puisqu’ilssont indissociables du concept de mé-tier – par une déclinaison des compé-tences nécessaires au travail de média-tion. Ils ne peuvent être étudiés sans

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En guise de conclusion

une définition précise des missions desfemmes-relais/médiatrices sociocultu-relles, quel que soit leur statut. Lapoursuite de cette réflexion sur lecontenu de la formation doit donc ac-compagner celle sur la validation d’unnouveau métier, sur sa reconnaissanceet sur son positionnement par rapportaux métiers existants du travail social.

En effet, la qualité même de la forma-tion, et son contenu, est fonction desexigences professionnelles requises.Penser formation et qualification nepeut donc se faire indépendammentd’une réflexion sur le métier, sur leparcours et la promotion de ces nou-velles professionnelles.

Reconnaissance, statut, formation res-tent donc trois chantiers sur lesquelsl’ensemble des partenaires, institu-tionnels et associatifs, devront pour-suivre leur travail.

Il est difficile de définir ce nouveaumétier en émergence, si ce n’est par laplace qu’il occupe à côté des métiersdu travail social. Il s’agit d’un travailqui croise celui de l’assistante sociale,de l’éducateur spécialisé, de l’anima-teur de quartier, mais sans jamais s’ysubstituer puisqu’il se situe enamont. Le travail de relais ou de mé-diation consiste à faire passer d’une si-tuation X à une situation Y; c’est une

fonction de «passeur» qui se posi-tionne à la fois dans la complicité etdans l’altérité.

L’apparition de nombreuses structuresde femmes-relais témoigne d’une«panne» dans le domaine du travailsocial ; mais, pour autant, le groupeentend questionner le positionnementdes femmes-relais en complémentaritédes fonctions et des métiers existantset les possibles mobilités et promo-tions professionnelles de ces nouvellesintervenantes.

Cela fera l’objet des discussions lors dela Rencontre2 au cours de laquelle seraprésenté ce référentiel métier : com-ment l’apparition et le développementdes associations de femmes-relais, pourrépondre, dans des conditions extrê-mement précaires, aux personnes lesplus en difficulté, nous obligent-ils àréfléchir à une restructuration de l’en-semble des métiers du travail social ?

Nous affirmons, à partir de ce référen-tiel métier, qu’il existe une fonction demédiation sociale dans les quartiers, àl’interstice des métiers du travail socialexistants, et qu’il convient de la struc-turer par un statut reconnu, validé,permettant, au terme d’un processusde qualification, d’accéder à un métier.

2. Cf. Profession Banlieue, voir bibliographie.

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Annexe

Les associations et les structures partenaires de Seine-Saint-Denis

Cette présentation date de 1997, époque de l’élaboration du référentiel. Les quatre struc-tures de Seine-Saint-Denis présentées alors poursuivent et développent leurs interven-tions. Elles continuent à jongler avec les différents dispositifs administratifs et les emploisaidés, notamment les adultes-relais. À titre d’exemple, l’Arifa emploie en avril 2001 douzefemmes-relais (dont dix ont un contrat d’adulte-relais) qui travaillent pour certaines àtemps complet.

Le travail d’analyse des pratiques de médiation s’est appuyé sur l’action de quatrestructures de Seine-Saint-Denis : l’Association des médiatrices socioculturelles de Pan-tin, l’Arifa de Clichy-sous-Bois - Montfermeil, l’Arc-en-ciel du Londeau de Noisy-le-Sec,les agents de promotion de la vie sociale de la ville de Bondy. Une association du Val-d’Oise, l’Afavo, a également participé au groupe de travail.

Ces différentes associations et structures ont des histoires singulières, leurexistence est plus ou moins ancienne et leur ancrage territorial affirmé. Sileurs objectifs initiaux ne concernaient pas toujours la médiation, toutes dé-veloppent aujourd’hui une activité de femmes-relais ou de médiatrices socio-culturelles, pour laquelle elles ont suivi différents programmes de formation. Ilexiste donc un certain nombre de nuances et de variations dans les pratiquesde chacune d’elles, ce qui a offert un terrain d’investigation très large augroupe de travail.

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L’Association des médiatrices socioculturelles de Pantin

Historique

À Pantin, les femmes-relais se dénomment «médiatrices». Elles sont implantéessur la cité des Courtillières depuis 1993. Auparavant, elles ont travaillé pendanttrois ans à la cité nouvelle Emmaüs d’Aulnay-sous-Bois et à Bobigny pendantdeux ans (jusqu’en 1992). L’objectif de l’association est de lutter contre l’isole-ment et l’exclusion sociale afin de favoriser l’insertion sociale des familles étran-gères.

Activités

Les médiatrices assurent des permanences dans les institutions, font de l’ac-compagnement individuel et proposent des activités d’animation classiques(cours d’alphabétisation, cuisine, couture…) au local des Courtillières afin depermettre aux femmes qui restent enfermées chez elles de sortir, de s’émanci-per.

Les objectifs de médiation sont affirmés par les femmes de l’association qui in-diquent tendre à l’affirmation des liens de solidarité dans le quartier par le rap-prochement des cultures et le dialogue. Les médiations sont conçues de façonà ne pas générer d’assistanat. Elles s’exercent sous la forme d’une pédagogie«par l’exemple», pour répondre à une méconnaissance de la façon d’aborderune administration. Les médiatrices expliquent par exemple comment l’inscrip-tion à l’ANPE des femmes de la cité a été facilitée par une démarche collective,alors que la recherche d’emploi doit s’opérer de façon autonome.

De fait, les médiatrices tiennent tous les matins, depuis janvier 1997, une per-manence «emploi» dans le local de l’association. Celle-ci n’exclut en aucun casla démarche vers l’ANPE, mais doit la faciliter.

Elles ont mis en place des séances de médiation dans les écoles maternelles etélémentaires et dans les collèges. Cette activité répond à une demande des en-seignants ou des parents et se fait de façon individuelle ou collective.

Elles organisent également des informations collectives une fois par mois durantles cours d’alphabétisation, et participent une fois par semaine aux séances d’in-formation de la PMI auxquelles participent de plus en plus régulièrement despères. Ces réunions regroupent une cinquantaine de personnes qui sont préve-nues lors des cours de couture et au moyen d’affichettes apposées dans les hallsd’immeubles et les commerces.

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ANNEXE : Les associations et les structures partenaires

L’accueil à la permanence est assuré tous les jours par les deux médiatrices ainsique par une secrétaire et des bénévoles qui n’ont pas reçu de formation. La co-ordination est assumée par la médiatrice responsable des projets et des activi-tés.

Actuellement, les médiatrices interculturelles élargissent leurs interventions auquartier du Haut-Pantin en fonction de la demande des assistantes sociales. Celas’opère donc de manière irrégulière.

Formation

Les médiatrices ont suivi la formation dispensée par FIA-ISM principalementaxée sur une connaissance approfondie des institutions.

La formation comprend huit modules de quatre jours chacun :– le rôle et la fonction d’une médiatrice, en particulier par rapport à l’inté-

gration,– l’éducation à la santé et à la prévention,– l’hygiène et l’alimentation,– l’école et les familles immigrées,– le logement,– l’immigration (la législation, les institutions),– l’expression écrite et orale, la communication,– l’initiation à la gestion, administrative et financière, d’une association.

FIA-ISM insiste sur le champ d’action de la médiatrice, qui n’a pas de limite as-signable. ce champ peut être cerné approximativement, mais ne peut être en-fermé, tant existe une diversité des interventions : éducatives, familiales, sco-laires, juridiques, médicales…

«La médiatrice doit être formée pour gagner en efficacité, mais notre propos voulaitsouligner qu’elle représente une pratique sociale dont on n’a pas épuisé l’originalité,qui met en œuvre des savoir-faire empiriques souvent très subtils. À ce titre, son im-mersion au plus profond de la réalité devrait faire d’elle, à moyen terme, une auxiliairedans la reformulation des analyses et des stratégies sociales » (Hassan Hadj Nassar,directeur de FIA-ISM région parisienne).

Mode de rémunération

Les médiatrices sont sept, dont deux permanentes ; deux sont en contrat em-ploi solidarité, trois sont rémunérées sous forme de vacations payées 50 francsde l’heure, et trois sont bénévoles. La pérennisation de leur action est donc sou-mise à l’obtention de subventions. L’association est financée par le FAS, la Délé-

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gation départementale aux droits des femmes, le conseil général de Seine-Saint-Denis et la ville de Pantin.

Évaluation et suivi

Les médiatrices organisent une réunion hebdomadaire, placée sous l’autorité dela responsable de l’association, au cours de laquelle elles font le point sur l’en-semble du travail fait et à faire.

Elles n’ont pas de programme de formation continue spécifique, mais participentrégulièrement aux formations proposées par la ville et le CCFEL de Pantin (as-sociation de formation spécialisée sur les toxicomanies) ainsi que par FIA-ISMet par Afrique-Conseil.

Partenariat

Les médiatrices socioculturelles de Pantin sont très sollicitées par les diffé-rents partenaires sociaux de la ville : le service municipal de la jeunesse, la PMI,les écoles, la CAF, mais également par les services publics comme la RATP ouEDF-GDF.

Elles participent au collectif des associations des Courtillières qui rassemblel’ensemble des associations de ce quartier en vue d’élaborer une charte localedes associations.

La municipalité souhaitait mettre en place un «conseil consultatif des étrangers»pour lequel elles ont été sollicitées. Elles ont répondu à la demande et travaillenten étroite collaboration avec la municipalité et avec le chef de projet du contratde ville.

L’Arifa, association des femmes-relais de Clichy-sous-Bois et de Montfermeil

Historique

L’Arifa (littéralement Archives de l’immigration familiale) est implantée à Mont-fermeil depuis 1990. Cette association a pour spécificité de s’adresser à une po-pulation étrangère non francophone d’origine rurale et, à ce titre, dépourvue de

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ANNEXE : Les associations et les structures partenaires

repères spatio-temporels citadins. De ce fait, son objectif principal est de per-mettre l’accès de ces personnes à l’autonomie.

L’Arifa spécifie particulièrement la notion de passage entre deux cultures, et travaillenotamment la question de la mémoire afin d’établir une continuité entre le «là-bas»et «l’ici». Il s’agit en l’occurrence d’un travail plus ethnopsychologique que social, carsi les barrières du langage s’imposent, elles n’impliquent pas obligatoirement la pré-carité sociale. La langue représente alors un prétexte à l’incompréhension, aumanque de connaissance réciproque, et favorise les «violences symboliques».

Activités

L’activité des femmes-relais associe un travail d’accompagnement et d’interpré-tariat des langues comme des usages et mentalités français et étrangers ; lesfemmes-relais interviennent en qualité de :– assistantes interprètes des mères de famille dans le secteur de la santé (elles

réalisent des permanences dans les PMI de Clichy-sous-Bois et de Montfer-meil – en centre ville et aux Bosquets –, et à l’hôpital de Montfermeil),

– accompagnatrices et interprètes des personnels médicaux et sociaux,– intermédiaires à l’école, entre les familles, les enseignants et la psychologue

scolaire,– accompagnatrices et interprètes auprès des instances administratives : mai-

rie, sécurité sociale, préfecture, CAF, EDF, Trésor public, office départemen-tal d’HLM, bureau de poste, commissariat de police, SSAÉ (Service sociald’aide aux émigrants), Assedic, ANPE…

Les femmes-relais assurent des permanences hebdomadaires dans plusieursécoles élémentaires, mènent des accompagnements individuels dans les collègeset les lycées, et sont présentes lors d’entretiens collectifs avec les enseignants.

Dans les autres institutions, les permanences sont organisées selon un modecommunautaire, car le besoin de traduction est fort sur ce secteur où résidentde nombreuses personnes ne maîtrisant pas le français. L’activité se caractérisepar deux tâches principales : l’animation de la salle d’attente (diffusion d’infor-mations sur le fonctionnement administratif, les droits des personnes et les ac-tivités de l’association), l’assistance des personnes lors de leurs rapports avecl’institution (traduction, négociation, médiation).

L’Arifa est l’association du département qui réalise le plus grand nombre de per-manences dans les institutions. Ces permanences sont assurées par les femmes-relais et constituent l’une des rares prestations de service rétribuables ; elles ontdonc une forte incidence sur l’organisation du travail. Cette rétribution consti-tue une reconnaissance du service rendu et fait l’objet de conventions négo-

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ciées. Il existe donc une contrainte importante liée à la commande et à la pro-duction de ressources propres pour l’association.

Les femmes-relais réalisent également des accompagnements individuels auprèsdes instances administratives du secteur et des structures hospitalières régio-nales. Si l’Espace de vie sociale de Montfermeil représente un lieu d’accueilconvivial où sont organisées des activités pour les femmes de la cité, les femmes-relais n’ont pas en charge ce rôle d’animation.

L’Arifa organise des séances collectives d’information réunissant une vingtainede personnes au plus. Ces réunions, qui existent depuis cinq ans, ont atteint unepériodicité hebdomadaire et constituent de petits cycles sur un sujet donné,choisi par les femmes elles-mêmes. La diffusion des invitations est réalisée ora-lement et par des relances téléphoniques.

La séance est construite autour de l’intervention d’une unique personne res-source, pour constituer un repère fort sur un sujet précis. Les réunions sontpréparées par une formation des femmes-relais sur le sujet exposé, car ces der-nières animent les débats, en assurent la traduction et réalisent les médiationsavec les représentations dans la culture d’origine.

La permanence, au local associatif, est tenue par une coordinatrice qui gèrel’agenda des femmes-relais. La coordinatrice ne réalise aucun accompagnement,mais démêle les situations nouvelles, apprécie le besoin d’accompagnement etassure un suivi et un soutien moral. Elle assure à la fois la répartition des ac-compagnements et le contrôle de leur nécessité, ce qui la place dans une posi-tion hiérarchique de fait par rapport aux femmes-relais. Elle a reçu la même for-mation que les femmes-relais.

Formation

Le projet de l’Arifa a été développé en collaboration avec la PMI de Montfer-meil ; c’est pourquoi la formation initiale des femmes-relais est principalementconsacrée au secteur santé et à la connaissance des institutions sanitaires et so-ciales. Cette formation, avant la prise de fonction, consiste en un enseignementde six semaines dispensé par des professionnels de la santé et du secteur social.La formation est continuée par un suivi bimensuel des femmes-relais sous formed’un groupe de parole encadré par deux ethnopsychologues : travail en groupedes interactions relationnelles vécues et des émotions qu’elles ont fait naître,positionnement de la place et du rôle de la femme-relais, techniques d’entretienen fonction des lieux d’intervention…

Ponctuellement, des séances d’informations spécifiques sont réalisées avec les or-ganismes partenaires comme La Poste, le Trésor public, les enseignants de la ZEP…

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ANNEXE : Les associations et les structures partenaires

En outre, les partenaires de l’Arifa dispensent des formations « techniques» auxfemmes-relais. Les propositions sont nombreuses (SSAÉ, CAF, avocats…) et per-mettent aux femmes-relais de réactualiser leurs connaissances, ainsi que de tis-ser un véritable réseau partenarial avec les institutions locales.

Mode de rémunération

L’Arifa emploie actuellement sept femmes-relais à raison de 110 heures parmois maximum rémunérées sous forme de vacations sur la base horaire de45 francs. Elle est dépendante des subventions accordées par le Fonds d’actionsociale et la préfecture, dans le cadre du contrat de ville. Elle a par ailleurs uneconvention avec le conseil général pour ses interventions dans les PMI de Cli-chy-sous-Bois et de Montfermeil.

Évaluation et suivi de l’action

Une réunion hebdomadaire d’échange et de retour sur les pratiques se dérouledans les locaux de l’association. L’agenda des accompagnements et des forma-tions est défini lors de cette réunion. Deux fois par mois, cette réunion est or-ganisée autour de la présence d’un ethnopsychologue (cf. supra). La coordina-trice et la directrice de l’association ne participent pas à ces réunions : ce lieu deparole doit être libre vis-à-vis de la hiérarchie. Ce travail d’équipe ne donne lieuà aucune formalisation écrite.

L’évaluation de l’action réalisée se fait en regard de l’objectif initial : rendre lesfemmes autonomes dans l’accession aux services urbains courants. Le bilan d’ac-tivité de l’association se révèle être principalement quantitatif, pour deux raisonsprincipales : il témoigne du service rendu et sert ainsi de justificatif auprès des dif-férents financeurs. Ces sources sont facilement accessibles, puisque chaque ac-compagnement est consigné dans les fiches d’activité de chaque femme-relais.

En revanche, l’évaluation de l’accès à l’autonomie des femmes est plus difficile àtranscrire, même si, au cas par cas, la connaissance fine du public concerné per-met d’observer les évolutions individuelles. L’Arifa ne possède aucun indicateurexpliquant à quel moment l’accompagnement individuel d’une personne cesse.De surcroît, il s’agit en l’occurrence d’évolutions très lentes qui ne sont pas si-gnificatives sur un an.

Il se pose ici une autre question : l’évolution des activités des femmes-relais est-elle le signe d’une évolution de son public, ou, au contraire, le caractère durablede ses activités est-il relatif à un renouvellement permanent de la population duquartier ? En effet, l’Arifa, qui était principalement structurée autour de missions

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de services (accueil, accompagnement), développe de plus en plus d’animations(séances d’information…). Ce fait est certainement lié à l’appropriation de l’Es-pace de vie sociale par l’association, qui devient ainsi un point de repère dans lequartier pour les femmes, mais aussi désormais pour les jeunes et un nombrecroissant d’hommes.

Dans un cas comme dans l’autre, on constate que l’évaluation de la structure estfortement dépendante du public touché, et de données le concernant.

Partenariat

L’Arifa a développé de nombreux partenariats (cf. supra) qui répondent tant auxbesoins des usagers qu’à des nécessités de « survie» pour l’association : les réa-lités sociales, économiques et politiques de Clichy-sous-Bois et de Montfermeilimposent ces partenariats. Il s’agit véritablement d’un ajustement au principe deréalité.

Les agents de promotion de la vie sociale de Bondy

Historique

Dès 1991, les partenaires sociaux qui intervenaient sur le quartier de Bondy nordconstataient l’aggravation des problèmes sociaux non résolus et le peu de partici-pation des habitants à la procédure de DSQ (développement social des quartiers).

À l’issue d’un forum des partenaires sociaux, la municipalité sollicitait la Fédéra-tion nationale Léo-Lagrange pour mettre en œuvre un projet communautaire in-terpartenarial, former des femmes repérées comme particulièrement actives surle quartier à devenir des agents de promotion de la vie sociale et impulser unevie sociale plus solidaire entre les habitants. Dès le départ, les promoteurs decette action ont fait le choix d’appeler ces femmes-relais « agents de promotionde la vie sociale», pour les différencier dans leurs rôles et leur formation. Tou-tefois, les bénéficiaires de leurs activités les appellent les femmes-relais deBondy, dénomination qu’elles-mêmes utilisent.

En vue de cette formation, la première mission de la Fédération nationale Léo-Lagrange avait été de constituer un comité de pilotage : il regroupait les repré-sentants des habitants du quartier, la mairie de Bondy, la Délégation départe-mentale aux droits des femmes, le centre social Accueil et Promotion, la cir-conscription de travail social (Direction de la prévention et de l’action sociale

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

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ANNEXE : Les associations et les structures partenaires

du conseil général, PMI, CAF, hôpital Jean-Verdier, CRAMIF [Caisse régionaled’assurance maladie d’Île-de-France], le service social scolaire et la Fédérationnationale Léo-Lagrange.

Cette formation était inscrite dans un programme européen, NOW, qui a ap-porté, outre des moyens financiers, un soutien technique et des relations trans-nationales avec Valence (Espagne).

Activités

Actuellement, les agents de promotion de la vie sociale sont cinq, dont deux ex-clusivement francophones. Elles s’adressent prioritairement aux femmes étran-gères, mais élargissent leur intervention à la population française et visent éga-lement au développement des liens entre les différentes communautés ainsi qu’àla réduction des situations d’enfermement, de repli sur soi, liées à une grandeprécarité. La fonction d’interprétariat n’est donc pas privilégiée, ni même aucœur de leur action.

Compte tenu des orientations voulues par les promoteurs de l’action, cesfemmes réalisent des accompagnements auprès des institutions. Elles tiennentleurs permanences au centre social Jean-Giono de Bondy nord tous les jours àl’exception du mercredi, et sur le quartier Blanqui, mais il n’y a pas de perma-nence dans les institutions et il n’existe pas de spécialisation des activités, hor-mis les traductions. Les cinq femmes-relais à mi-temps se succèdent à la per-manence d’accueil selon l’organisation des besoins pour les accompagnements.La coordinatrice ne reçoit pas les usagers, mais elle apporte un soutien tech-nique aux femmes-relais et anime la réunion hebdomadaire de l’équipe et le co-mité de pilotage.

Les utilisatrices sont à 80 % des femmes qui habitent Bondy nord ou le quartierBlanqui. La majorité a des enfants à charge, à la différence des hommes, souventisolés, qui se présentent plus fréquemment depuis 1997. Les nationalités les plusreprésentées sont celles du Maghreb et de l’Afrique subsaharienne.

Les femmes-relais organisent également des réunions mensuelles (bientôt bi-mestrielles) intitulées «Les Jeudis de Bondy nord», rassemblant soixante à centpersonnes et animées par un intervenant spécialisé. Le public est constitué aussibien des habitants du quartier que des élus locaux et des travailleurs sociaux oude toutes autres personnes. En 1996-1997, différents thèmes auront été abor-dés : l’autorité parentale, la violence, la sécurité des enfants… Les séances don-nent lieu à plusieurs interventions suivies de débats, simultanément traduits, puisà des tables rondes réunissant le public et les femmes-relais pour expliquer lespoints restés obscurs. Ces tables rondes donnent lieu à la rédaction de comptes

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rendus. Cette organisation demande une préparation et un suivi important auxfemmes-relais. Les tables rondes sont suivies d’actions : expositions, visites, fêtesde quartier…

Enfin, dans l’esprit de leur formation, à savoir la démultiplication de leur action etl’impulsion de nouvelles activités, les femmes-relais ont participé, avec le centresocial Jean-Giono et des habitantes du quartier, à la création d’une association :Domino, qui regroupe plus de cinquante femmes pour différentes activités.

Formation

La formation, encadrée par la Fédération nationale Léo-Lagrange, a duré dix-huit mois. La première mission des agents de promotion de la vie sociale a été decréer le comité de pilotage en vue de détecter les six femmes qui participeraientà la formation et d’en définir le contenu. Il a été organisé autour de trois concepts :– se rendre capable,– travailler en équipe,– démultiplier son action.

Composée de neuf modules, cette formation a consisté en une mise à niveau(français oral et écrit, mathématiques) et en huit modules alliant théorie etstages séjours auprès des institutions partenaires : prévention santé et des toxi-comanies, santé et hôpital, accès aux soins et aux droits des citoyens : CAF,CPAM (Caisse primaire d’assurance maladie), sécurité sociale, circonscription duservice social, école, structures administratives…

À l’heure actuelle, l’encadrement post-formation est assuré par les assistantessociales de la Direction de la prévention et de l’action sociale (DPAS) du conseilgénéral qui réactualisent les connaissances des femmes-relais, alors que legroupe de pilotage auquel participent les travailleurs sociaux du secteur définitles grandes orientations. Par ailleurs, est prévue une formation intensive contrel’illettrisme pour deux des femmes qui ont un niveau CE 1, mais le financementde l’État a été refusé.

Mode de rémunération

Lors de leur formation et durant leur première année de fonctionnement, lesfemmes ont bénéficié d’un contrat emploi solidarité, c’est-à-dire à mi-temps eten contrat à durée déterminée, au sein d’une association paramunicipale(l’Abac), pour être ensuite salariées de cette association à mi-temps pendantdeux ans. Elles sont actuellement salariées de la ville, sur un statut «déroga-toire» de contractuelles (agent social, catégorie C) accepté par la préfecture du

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

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ANNEXE : Les associations et les structures partenaires

fait de la spécificité de leur travail. Elles bénéficient des mêmes avantages(congés, grilles indiciaires) que les fonctionnaires de la ville.

Évaluation et suivi de l’action

Chaque semaine, les femmes-relais organisent une réunion hebdomadaire entreelles pour faire le point sur les suivis individuels et les activités collectives. Lesfonctions de coordination et de contrôle sont réalisées par une employée mu-nicipale et par le comité de pilotage qui réunit, une fois par mois, les élus en tantque décideurs et l’ensemble des travailleurs médico-sociaux de la communepour déterminer la place des femmes-relais par rapport à ceux-ci. Une réunionde coordination est organisée si un problème spécifique ou un projet apparaît.

Partenariat

Il s’agit d’un projet issu d’une volonté politique municipale, relayé par des acteurslocaux, piloté par une équipe multidisciplinaire mise en place, utilisant la méthodedu travail communautaire partenarial et non du développement d’une association.Le partenariat est développé dans le cadre du comité de pilotage qui regroupe lesagents de promotion de la vie sociale, les professionnels des différentes institu-tions (DPAS, PMI, CAF, hôpital Jean-Verdier, CRAMIF et service social scolaire) etles élus de la ville (la Délégation départementale aux droits des femmes et la Fé-dération nationale Léo-Lagrange, au terme de sa mission, n’en font plus partie).

De nombreuses réunions de travail ont également lieu avec les écoles et les éta-blissements scolaires, avec les maisons de quartier, avec le CCFEL (association deformation spécialisée sur les toxicomanies) ou d’autres associations de la villecomme le Centre protestant de rencontre et d’amitié, avec EDF-GDF et La Poste.

L’Arc-en-ciel du Londeau, à Noisy-le-Sec

Historique

L’Arc-en-ciel du Londeau, qui existe depuis 1984, est à l’origine une association dequartier rassemblant des femmes de toutes nationalités autour de trois objectifs :– la promotion des femmes par des actions d’information, de formation

(santé, éducation, vie quotidienne, projet professionnel) et leur participationaux actions les concernant ;

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– l’accompagnement éducatif des enfants dès la petite enfance et la préven-tion de l’échec scolaire (halte-garderie éducative, accueil conjoint mère-en-fant, activités éducatives périscolaires, ateliers d’expression, Réseau solida-rité école) ;

– le développement de la vie sociale et la dynamisation d’un réseau motivépour une meilleure insertion sociale des familles.

La création de l’activité « femmes-relais» fait suite à l’analyse des besoins des fa-milles les plus en difficulté d’insertion sociale et avait fait l’objet de rencontrespréalables avec l’Arifa et la Délégation départementale aux droits des femmes.

Activités

L’Arc-en-ciel du Londeau a développé son action de femmes-relais depuis sep-tembre 1994 autour de quelques objectifs généraux :– assurer un accueil et une médiation interculturelle pour les femmes et les

familles d’origine étrangère ou française de la cité du Londeau et des quar-tiers proches, en difficulté d’insertion sociale ;

– informer et aider dans les problèmes de la vie quotidienne ;– faciliter la communication entre les familles et les acteurs sociaux ;– repérer les besoins et les suggestions des habitants et les faire connaître aux

décideurs.

«L’action des femmes-relais de la cité du Londeau ne consiste pas seulement à indi-quer aux familles en difficulté quels parcours suivre pour essayer de réduire ou ré-soudre ces difficultés, ni de se substituer à l’action des travailleurs sociaux. La premièrevocation de leur action est l’accueil de la personne humaine en détresse et son ac-compagnement. Il contribuera à maintenir ou restaurer le lien social, à établir une re-lation d’échange et à prévenir la menace d’effondrement ou d’éclatement représentéepar des situations d’autant plus extrêmes qu’elles sont vouées à l’isolement et au si-lence» (Martine Decourt, psychologue).

L’association dispose de deux salles : au local de l’association proprement dit, lespersonnes viennent à la rencontre des femmes-relais, mais cette démarche nepeut être entreprise que parce qu’il existe dans la cité tout un travail amont, deproximité. Y sont également organisées des réunions d’information collectives lejeudi après-midi une fois par mois sur les thèmes privilégiés de la santé et del’école ; environ vingt-cinq femmes y assistent. D’autres réunions sont organiséesle vendredi soir pour permettre aux pères d’y participer. Le public est prévenuoralement ainsi que par un affichage de proximité.

Un deuxième local, le local d’accueil des femmes-relais, a été séparé de celui desactivités associatives pour assurer une plus grande confidentialité aux personnes

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

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ANNEXE : Les associations et les structures partenaires

en difficulté. L’association insiste sur son action à destination des familles fran-çaises très précarisées pour éviter leur repli vers les thèses extrémistes (Frontnational).

Formation

Les femmes-relais n’ont pas bénéficié de formation spécifique de « femmes-re-lais » mais se sont formées par des stages et le recueil d’informations dans lesservices administratifs pendant deux mois :– services municipaux,– équipe de maîtrise d’œuvre urbaine et sociale (MOUS) qui a permis la for-

malisation de cette action de médiation.

Cette formation se poursuit par des rencontres régulières avec le responsablede la CRAMIF, le médecin de santé publique, le proviseur du lycée ou les princi-paux des collèges… Les femmes-relais bénéficient par ailleurs d’une formationintensive sur les questions de santé organisée par la DDASS, formation payéepar la DRASS Île-de-France et ouverte à d’autres femmes qui deviendrontfemmes-relais, ce qui permettra à l’association de développer son action sur lequartier de La Boissière.

Mode de rémunération

Les femmes-relais, au nombre de quatre, en contrat à durée indéterminée, sontpayées sur une base de 50 francs de l’heure et travaillent l’équivalent d’un quart-temps mensuel. Elles sont donc soumises aux aléas de l’obtention des subven-tions qui viennent du FAS, du contrat de ville (FIV, Fonds interministériel d’in-tervention pour la ville), de la société civile immobilière, de l’APES (Associationpour les équipements sociaux, qui gère des locaux sociaux de l’OCIL, Office cen-tral interprofessionnel du logement) et de la Délégation départementale auxdroits des femmes.

Évaluation et suivi de l’action

Les femmes-relais bénéficient d’une réunion hebdomadaire avec une psycho-logue et d’une réunion toutes les six semaines avec l’équipe du contrat de ville.Différentes personnes ressources assurent le suivi de leurs interventions :– sur les questions sociales, le responsable de la CRAMIF et deux assistantes

sociales,– sur les droits des immigrés, le GISTI (Groupe d’information et de soutien

aux immigrés) et l’avocat qui assure des permanences en mairie,

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– sur l’emploi, le chargé de mission insertion du contrat de ville,– sur la santé, le médecin du service de santé municipal,– sur l’école, le proviseur du lycée,– sur la consommation, la Confédération syndicale du cadre de vie…

Partenariat

L’association insiste sur sa volonté d’intensifier le partenariat avec l’Éducationnationale (le quartier du Londeau jouxte une immense cité scolaire qui regroupedes écoles élémentaires, plusieurs collèges, deux lycées professionnels et unlycée classique) : elle fait partie des comités d’environnement social des deux ly-cées d’enseignement professionnel et participera à celui qui se met en place surle collège, avec pour volonté de rappeler la place des parents dans les établisse-ments scolaires.

Avec la FCPE (Fédération des conseils de parents d’élèves), elle organise uneaction sur le thème « violence et droits » en direction des enseignants, des gar-diens d’immeuble et de l’équipe du contrat de ville.

L’association participe également au collectif « solidarité-précarité » avec laCRAMIF, le Secours catholique, le Secours populaire, la Croix-Rouge, la CAFet un élu municipal. Ce collectif pourrait aboutir à la création d’une commis-sion extra-municipale sur ces questions. Il est également l’occasion de tra-vailler sur la complémentarité des rôles entre femmes-relais, CRAMIF, assis-tantes sociales, PMI…

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

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1. La médiation sociale et culturelle :émergence et professionnalisation desadultes-relais. Comment penser laprofessionnalisation des fonctions demédiation et des adultes-relais ?

Élisabeth Maurel, chercheur en sociologie, GREFOSS–IEP (Grenoble) p. 59

2. Des savoirs de l’expérience au métier :l’exemple des femmes-relais

Élisabeth Dugué,ingénieur de recherche en sociologie du travail, CNAM p. 73

Deux résonances actuelles

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LA professionnalisation desfonctions de médiation et desadultes-relais est une question

qui s’inscrit dans un champ large deréflexion autour des nouvelles moda-lités de l’intervention sociale.

DES MÉTIERS DE PROXIMITÉ ET DE PRÉSENCE SOCIALEEN ÉMERGENCE DANS L’ESPACE PUBLIC

Des métiers de proximité et de présence sociale

Les observations qualitatives commeles enquêtes statistiques révèlent de-

puis quelques années l’émergencedans l’intervention sociale d’un en-semble de fonctions de proximitéque nous avons qualifiées de «mé-tiers de la présence sociale » et quipeuvent se classer en trois sous-groupes :

• Les métiers de l’accueilLes fonctions d’accueil s’autonomi-sent dans les équipements et les ser-vices à la fois par rapport aux tâchesadministratives auxquelles elles

La médiation sociale et culturelle : émergence et professionnalisation des adultes-relaisComment penser la professionnalisation des fonctions de médiation et des adultes-relais ? 1

Élisabeth Maurel, chercheur en sociologie, GREFOSS–IEP (Grenoble)

1. Ce texte reprend l’intervention réalisée pour lecolloque organisé par le CR•DSU (Centre de res-sources et d’échanges pour le développement socialet urbain – Rhône-Alpes), Cogelore (Comité degestion des locaux résidentiels), FONDA Rhône-Alpes, le 9 novembre 2000 à Rilleux-la-Pape.

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étaient associées (secrétariat, stan-dard, guichet…) et par rapport auxtâches propres de l’intervention so-ciale dont elles deviennent la pre-mière marche en assumant de plus enplus un rôle de premier diagnostic etde première orientation, d’informa-tion et parfois de médiation.

• Les métiers de rue et de médiation sociale

Ce sont des fonctions qui se dévelop-pent pour l’essentiel dans le cadre dela gestion sociale urbaine. Il s’agit dela création plus inédite de formes deprésence sociale dans l’espace public,avec le triple objectif de gestion deliens sociaux de proximité, de média-tion vis-à-vis des institutions, de pré-vention et de gestion de conflits de laquotidienneté.

• Les métiers du domicileCe sont des services à la personne ap-portés au domicile des particuliers ourendus à son propre domicile, ser-vices en fortes progression et trans-formation.

L’ensemble de ces métiers de proximitéforment une catégorie homogène, mal-gré des contenus différents, en raisonde fortes caractéristiques communes:1 – Ils assurent une relation immédiate

avec l’usager ou l’habitant, dans unéchange de proximité non différéet non codifié par des procéduresstrictes. C’est une présence inscrite

dans l’espace quotidien, une sortede ligne de front du social. Mais cene sont que des fonctions de pré-sence et non des fonctions de trai-tement ou de prise en charge.

2 – Ils sont investis par des personnessans qualification ou avec defaibles qualifications le plus sou-vent, mais qui manifestent uneforte aspiration à la qualification.Ce sont des métiers en recherchede légitimité, engagés dans unprocessus de « transfiguration» detâches subalternes, et qui ouvrentla voie d’une requalification des«petits boulots du social ».

3 – Ce sont enfin des emplois souventremplis par des catégories socialesen recherche d’intégration sociale :jeunes, femmes, personnes d’ori-gine étrangère, avec des statuts engénéral très précaires.

Les métiers de présence sociale se déclinent dans tous les secteurs

On peut identifier cinq grands sec-teurs de l’intervention sociale tousconcernés par cette évolution :

• Le secteur de l’animation territoriale

Ce secteur est aussi nommé commecelui de la gestion urbaine de proxi-mité. On peut « affecter » à ce secteurdes fonctions telles que celles des ha-bitants-relais, correspondants de

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

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quartiers, médiatrices culturelles,agents de proximité, agents de pro-motion de la vie sociale, voire mêmeanimateurs sportifs, etc.

• Le secteur de l’accès aux droitsIl recouvre les agents d’accueil, lesécrivains publics, les auxiliaires so-ciales, les femmes-relais, les consul-tants sociaux et, sous d’autres appel-lations encore, toutes sortes de fonc-tions de « facilitateurs de l’accès auxdroits ».

• Le secteur de l’insertion sociale et professionnelle

Dans ce secteur se développent despratiques de tutorat, de parrainage,d’accompagnement, de premier ac-cueil…, autant de formes d’accompa-gnement de proximité en aval de l’in-tervention des chargés d’insertion.

• Le secteur de l’aide à la vie quotidienne

Plus traditionnel, ce secteur est tou-tefois en pleine explosion, avec le dé-veloppement des services à domicile,de l’accueil familial, des soins de ca-ring, de la présence auprès de per-sonnes dépendantes, âgées, isolées.

• Le secteur de l’éducationIl s’ouvre progressivement à la pré-sence sociale, avec le développementdes fonctions de parents ressources,relais éducatifs, aides éducateurs, ac-compagnateurs scolaires, etc.

La montée de ces emplois de pre-mière ligne est le phénomène le plussignificatif dans le champ de l’inter-vention sociale, et leur qualificationun enjeu de première importancepour les années à venir.

Une caractéristique commune : la proximité

Le critère majeur autour duquel seconstruisent les métiers de premièreligne, en contact immédiat avecl’usager, est celui de la proximité.Cette notion de proximité met en jeudifférents éléments.

• Il s’agit tout d’abord d’une proxi-mité spatio-temporelle : partage dumême espace-temps que le public,sans procédures formalisées et diffé-rées de rencontre. Cette proximitéspatio-temporelle peut être analyséepour une part comme une réponsesociale spontanée (non construite apriori par l’action publique) à l’ac-centuation des approches procédu-rales et à des processus de distancia-tion dans l’intervention sociale, ainsiqu’à une certaine perte de confianceenvers les acteurs institutionnels.C’est une présence en temps réel quiest apportée par les métiers de proxi-mité, dans un espace qui se constitueà mi-chemin entre l’espace totale-ment privé (familial, domestique) etl’espace institutionnel. Se constituent

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ÉLISABETH MAUREL – La médiation sociale et culturelle : émergence et professionnalisationdes adultes-relais

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des espaces tiers, qui donnent corps àla notion d’espace public, tels que leslocaux de femmes-relais, les réseauxd’habitants, les lieux d’écoute et desolidarité, etc. Le récent rapport deClaude Brévan et de Paul Picard2 surles métiers de la ville souligne biencet effet de « réinvestissement de l’es-pace public ». L’espace public estautre que l’espace institutionnel qui apeu à peu enfermé les formes ma-jeures de l’action sociale. C’est celuiqui autorise les interfaces entre pro-fessionnels, habitants, usagers, élus,militants… C’est celui où se déploieun débat, se confrontent des réfé-rences, s’élaborent des compromis,s’éprouve la pluralité, se construisentune connaissance partagée, et desnormes partagées.

• Il s’agit aussi d’une proximité cul-turelle et sociale : les métiers de proxi-mité, et notamment ceux de l’anima-tion territoriale, sont souvent occupéspar des personnes de même origineculturelle et ethnique que les publicsconcernés. Mais cette proximité estaussi sociale, puisque ce sont l’expé-rience biographique, l’histoire per-sonnelle, le savoir expérientiel quisont privilégiés comme source de légi-timité, de savoir, de compréhension.

DES ENJEUX QUI DÉPASSENT LE STRICTCHAMP DU TRAVAIL SOCIAL

La question de la multiplication deces nouvelles formes de présence so-ciale a souvent été posée au regard deleur place face aux métiers classiquesdu travail social : complémentaire,substitutive, concurrentielle, travailsocial au rabais, non qualifié ?

Il semble que le débat doive êtreélargi à des enjeux qui dépassentcette simple question de confronta-tion de métiers, et qui recouvrentdeux questions principales : la ques-tion culturelle et ethnique dans la so-ciété d’aujourd’hui d’une part, laquestion de la construction des sa-voirs sociaux d’autre part.

La question culturelle et ethnique

Un lien étroit existe entre le dévelop-pement des fonctions d’adultes-relaisdans les quartiers et les questions del’intégration. On peut éclairer ce lienen s’appuyant notamment sur les ré-flexions de Michel Wieviorka, de Di-dier Lapeyronnie et d’Alain Touraine3.

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

2. Cf. bibliographie.3. Cf. WIEVIORKA Michel (dir.), Une sociétéfragmentée : le multiculturalisme en question,Paris, La Découverte, 1996.

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• La question de l’intégration renvoie à deux figures de l’immigré dans la société

La première figure renvoie à celle del’étranger qui arrive et va devoir s’in-tégrer dans la société d’accueil. Est encause alors le passage de ce que les so-ciologues ont appelé la « commu-nauté » à la « société », plus individua-liste et dont il faut assumer les nou-velles valeurs. La culture d’origine estalors vécue comme un héritage dontl’immigré doit se défaire pour s’inté-grer. Dans ce contexte, les média-teurs socioculturels sont en quelquesorte des modèles identificatoiresd’intégration. Mais est-il nécessaireque cette fonction se structure dura-blement ? Finalement, ce n’est peut-être que le problème d’une ou dedeux générations, le problème deceux qui arrivent.

Mais on peut se référer à une autre fi-gure de l’immigré : la figure de mino-rités intégrées dans la société d’ac-cueil mais dont l’identité reste mar-quée par une différence, par un stig-mate que la société appose. Cettethématique n’est pas en cause pourles seuls immigrés, mais plus large-ment pour toutes les communautésmarginalisées. C’est ainsi, parexemple, que, aux États-Unis, ledébat sur les communautés eth-

niques s’est élargi aux femmes, auxhomosexuels, aux quartiers trèspauvres, etc.

• Les enjeux de la questionsociale sont devenus inséparables de ceux de la société multiculturelle

Au regard de ces minorités, l’enjeuest de construire une société multi-culturelle dont le but soit la luttecontre les discriminations et les iden-tités stigmatisées, tout en permettantque vivent ensemble des apparte-nances culturelles qui ne soient nirepli communautariste ni renforce-ment des inégalités.

L’émergence des adultes-relais dansles quartiers se situe très précisémentsur ce point, pour une large part. Laquestion sociale aujourd’hui ne peutplus être traitée comme il y a cin-quante ou cent ans, en ce sens qu’ellen’est plus seulement économique,mais que les problèmes écono-miques, de chômage, de pauvreté,d’exclusion sont indissociablementliés aux enjeux culturels. Ces dernierssont au cœur de l’analyse de la ques-tion sociale et du changement social.

Ainsi a-t-on vu aux États-Unis, maisaussi en France, les débats sur la jus-tice sociale évoluer vers un débat surles identités collectives. Inégalité et

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discrimination sont deux élémentsque l’on ne peut séparer.

• Différence, égalité, universalité

Mais cette idée de multiculturalismeest encore presque taboue, et très lar-gement polémique. Elle fait peur.Elle évoque la mémoire du commu-nautarisme. C’est un débat délicat.Nous sommes dans une culture en-core complètement habitée parl’idéal de l’égalité républicaine,construite sur le refoulement desidentités particulières, face à l’Étatqui assure protection et bien-être.

Nous craignons une régression desvaleurs républicaines et, pour cer-tains intervenants sociaux, le renfor-cement de réseaux ethniques quiéloigneraient de l’intégration. L’ave-nir en ce sens est un défi : peut-onaffirmer des identités spécifiques quiparticipent à des valeurs universellescommunes, voire des différences quine soient pas inégalités ?

L’étude de Catherine Delcroix sur lesfemmes-relais4 montre qu’un traitconstant caractérise les femmes ren-contrées : la capacité à porter des va-leurs universalistes sur le registre dela lutte contre l’injustice et la discri-mination. Combiner unité sociale etpluralité culturelle, faire se com-

prendre et se féconder les diverses lo-giques culturelles, fonder la démo-cratie sur une combinaison de l’uni-versalisme des droits avec le particu-larisme des expériences de chaquesujet, reconnaître l’intérêt universelde chaque culture comme autantd’accès au sens de l’expérience hu-maine, tels sont les nouveaux défisde notre démocratie sociale.

On ne peut plus se situer dans la vi-sion simpliste d’un passage linéaireentre tradition et modernité, maison est confronté au défi de laconstruction de sociétés ouvertes.Certes, ce défi dépasse largement lesmodestes débats sur les adultes-re-lais. Mais ceux-ci sont bien situés aucœur de ces enjeux, l’enjeu de laquestion urbaine posée comme laconstruction d’une culture populairemétissée.

Cette construction d’une culture po-pulaire métissée, selon l’expressionde Michel Messu, pourrait appa-raître comme le rôle historique desnouveaux métiers de médiation,comme fut autrefois le rôle histo-rique du travail social de construirel’intégration de la classe populaireouvrière dans la société salariale etrépublicaine.

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

4. Cf. BERTAUX Sandrine et al., voir bibliogra-phie.

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La construction des savoirs sociaux

Le deuxième enjeu des nouveaux mé-tiers de présence sociale est celui dessources de la compétence et du sa-voir. La question posée est celle de sa-voir si l’on peut construire une quali-fication sur la base de compétencesbiographiques, liées à l’histoire de lapersonne, à son appartenance cultu-relle, à son parcours personnel, à sonexpérience.

• La question de la compétence

C’est une question qui traverse au-jourd’hui tout le marché du travail eta atteint le champ des interventionssociales. Les compétences, que l’onpeut appeler «qualifications expérien-tielles» ou « savoirs sociaux», s’oppo-sent pour partie à la fois à la qualifica-tion et à la légitimité institutionnelle.

• Les compétences comme capacitésrelationnelles et sociales peuventêtre opposées aux qualificationscognitives et techniques. Mais ilest souhaitable que les deux secombinent. La différence vientsurtout de ce que le diplôme ini-tial fonde la qualification réputéedéfinitivement acquise, alors quela compétence se construit indivi-duellement au fil des expériences.

La compétence associe des qualifi-cations apprises et des qualifica-tions expérientielles. On désignepar là des capacités acquises dansson parcours personnel et liées soità une culture d’appartenance, soità une histoire familiale, soit à desengagements personnels, soit àune expérience personnelle des si-tuations à traiter, etc. Les compé-tences expérientielles entraînenteffectivement des modalités deprofessionnalisation et une gestiond’emploi différentes : personnali-sation de l’embauche, disjonctionentre diplôme et fonction, avec unrisque de dérégulation des rap-ports de travail et de perte des ga-ranties collectives. Cela rend diffi-cile l’acquisition d’un statut.

• Les compétences peuvent aussi seheurter à la légitimité institu-tionnelle qui tire sa force de sonaspect réglementaire et hiérar-chique, alors que la légitimité dela compétence vient de l’effica-cité reconnue dans une tâche. Larhétorique compétence/qualifi-cation pose la question dessources du savoir et des capacitéset des sources de légitimité.

• Le croisement des savoirs

Les études montrent que les compé-tences expérientielles sont sources

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d’expertise, en ce qu’elles apportentsur le repérage des situations sociales,sur la compréhension des situations,sur la mise au jour des réseaux et desdynamiques sociales, des éléments deconnaissance que les approches insti-tutionnelles ne saisissent pas. Cela meten question le mode de constructiondes savoirs sociaux et les modalités deformation aux métiers sociaux.

Les savoirs sociaux reconnus sont pro-duits sous le registre de la sociologiescientifique telle qu’elle s’est construitedès le XIXe siècle, dans une oppositionidéologique, justifiée dans le contexte,à des approches plus subjectives. Elle a,dans ce contexte, insisté sur la notionde distance critique avec les représen-tations communes et dévalorisé l’expé-rience au profit du cognitif. Cela aproduit des pensées séparées, et lesécoles qui ont tenté de revaloriser unesociologie empirique conduite par desacteurs engagés ont été marginalisées.

La question qui revient aujourd’hui estcelle de la place et de la validité scien-tifique des savoirs expérientiels ainsirefoulés, dans une pratique de «croise-ment des savoirs» et de «co-produc-tion des connaissances» entre ces deuxmodes d’approches.

Pour illustrer ce propos, on peut évo-quer deux exemples parmi d’autres decette interrogation:1 – Les travaux de Laurence Roul-

leau-Berger menés auprès dejeunes en situation de grandeprécarité montrent les compé-tences construites par ces jeunesau sein même de leurs trajec-toires précaires, ainsi que lesprocessus sociaux actifs qui sedéveloppent lorsque sont pos-sibles les croisements de cescompétences avec celles des pro-fessionnels sociaux5.

2 – Un exemple d’une autre nature6

est apporté par la recherche expé-rimentale conduite pendantdeux ans par le mouvement ATDQuart Monde. Elle a consisté àréaliser un travail de croisementdes savoirs en faisant travaillerensemble des personnes en situa-tion de pauvreté et des universi-taires. Ce travail a donné lieu à lacoproduction de cinq mémoireset à un colloque en Sorbonne enavril 1999. Cette opération areçu une validation scientifiquesur les trois points qui fondent laconnaissance : la construction del’objet, la progression du savoirsur cet objet, le jugement cri-tique porté sur ce savoir.

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

5. ROULLEAU-BERGER Laurence, Le Travailen friches : les mondes de la petite production ur-baine, La Tour d’Aigues, Éditions de l’Aube,1999.6. Groupe de recherche Quart Monde-Univer-sité, Le Croisement des savoirs : quand leQuart Monde et l’Université pensent ensemble,Paris, Éditions de l’Atelier, 1999.

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Peut-on faire le pari que cetteconfrontation des systèmes de réfé-rence est aujourd’hui la démarche in-contournable pour construire des in-térêts collectifs au sein des groupes so-ciaux? Il s’agit de réussir à associer aupostulat de la connaissance scienti-fique, qui requiert la séparation d’avecl’objet étudié, une approche compré-hensive découlant de l’expérience sub-jective, sans que celle-ci ne se déformedans une connaissance émotionnelle.

Le croisement des savoirs évite de réin-terpréter les faits dans des catégoriesconstruites a priori et extérieures à l’ex-périence du sujet concerné. Comme ledit la sociologue Hélène Hat z feld :«Le métissage d’expériences est un fonde-ment essentiel de la légitimité de compé-tence, car il produit des sens nouveaux,des nouvelles représentations, des normesnouvelles.»

Cela est vrai pour les métiers sociaux,mais aussi, bien plus largement, pourles métiers de la santé, ceux de l’édu-cation, ceux de l’urbanisme, etc.

• Le mode de qualification et de compétence

Si l’on conçoit ainsi la productiondu savoir et de l’action, une tellequalification est à construire à partirde nouveaux modèles de formation :1 – Les formations doivent être qua-

lifiantes, tout en intégrant lescompétences biographiques etexpérientielles, notamment pardes procédures de validation desacquis. Certaines expérimenta-tions vont en ce sens (à l’AFPA7

ou au CNAM). Les associationsd’éducation populaire ont aussides savoir-faire en la matière(comme, par exemple, cette« école de projets » mise en placepar l’association Peuple et Cul-ture qui articulait la formationsur des acquis expérientiels).On peut espérer que la récenteloi de modernisation sociale per-mettra d’avancer dans cette voiede la validation des acquis, quiétait paradoxalement utiliséepour des formations supérieuresà l’université, mais totalementignorée dans le champ des mé-tiers sociaux.

2 – D’une manière générale, un im-portant travail de recherche pé-dagogique est à entreprendrepour capitaliser, structurer et dif-fuser les méthodes de coproduc-tion de savoirs sociaux et pourque cette démarche ne demeurepas dans un registre d’expéri-mentation ponctuelle, sympa-thique mais inutilisée.

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ÉLISABETH MAUREL – La médiation sociale et culturelle : émergence et professionnalisationdes adultes-relais

7. Association nationale pour la formation pro-fessionnelle des adultes.

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QUELLE PROFESSIONNALISATIONPOUR LES MÉTIERS DE MÉDIATION, DE RELAIS,DE PROXIMITÉ?

Décider la professionnalisationdes métiers de médiation, de relais, de proximité

Les débats sur la nécessité ou non deprofessionnaliser ces fonctions, sur lerisque de détruire la solidarité spon-tanée, de créer de faux sous-métiersprécaires, etc., semblent désormaisdépassés, pour quatre raisons :1 – La professionnalisation est unequestion de justice. Si l’on recon-naît ces fonctions comme utiles,voire incontournables pour assu-rer aujourd’hui certaines mis-sions sociales, parce qu’elles amé-liorent le fonctionnement desinstitutions, parce qu’elles amé-liorent l’intégration sociale,parce qu’elles contribuent à ré-duire les conflits sociaux, pour-quoi refuser de les légitimer ? Orc’est en donnant qualification,statut et salaire que l’on légitime.

2 – La professionnalisation s’imposecomme une réalité déjà en marche,qu’il faut encadrer et accompagner.Quels que soient les débats idéo-logiques, les faits ont la vie dureet ils finissent par s’imposer auxthéories. Or que disent les faits

aujourd’hui ? Depuis 1997, cesfonctions se multiplient. Elles re-cueillent un plébiscite des usa-gers. Les institutions sont satis-faites. Des collectifs de média-trices se créent, amorce de re-groupement professionnel. Desdiplômes expérimentaux com-mencent à naître un peu partout.Des formations sont mises enplace. Des statuts s’élaborent. Lesfaits sont là.Qu’on le veuille ou non, les élé-ments d’une professionnalisationsont en train de se mettre enplace : une organisation des per-sonnes entre elles, des réflexionssur les statuts, des savoirs spéci-fiques. Le problème, c’est d’ac-compagner ce mouvement dis-persé et surtout de passer de cettephase de reconnaissance à unephase de validation qualifiantequi n’est encore que balbutiante.

3 – La professionnalisation trouve saréelle justification dans les enjeuxsociaux en cause. Toute la littéra-ture sur la sociologie des profes-sions met en évidence qu’uneprofession se forme comme telleà partir du moment où la sociétéidentifie dans la fonction qu’elleremplit quelque chose de centralpour son fonctionnement et sonévolution. Or il semble évidentque l’on se trouve devant des en-jeux sociétaux fondamentaux. Ilest donc légitime que des métiers

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

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naissent autour de ces questionscentrales et qu’ils soient recon-nus. C’est un signe de légitimitédans la plus pure tradition socio-logique.

4 – La professionnalisation, enfin,doit s’amorcer parce qu’elle ren-contre aujourd’hui une conjonc-ture favorable. La conjoncture estfavorable, car portée par unmouvement d’ensemble et pardes dispositifs opportuns : em-plois-jeunes et circulaire sur lesadultes-relais. Tous les emplois-jeunes, certes, ne se réduisent pasà des emplois de médiation, et ilsrelèvent d’une politique beau-coup plus globale. Néanmoins,le caractère massif de ces créa-tions d’emplois, emplois qui ontvocation à être pérennisés,amène au premier plan de façonincontournable des réflexionsnouvelles sur les modes, les ni-veaux, les processus de qualifica-tion et de reconnaissance. Cemouvement doit profiter à l’en-semble des métiers concernés –emplois-jeunes, adultes-relais ouautres – qui doivent s’organiserpour que ces travaux et ces for-mations qui s’organisent soientélargis à tous.

Autre élément de conjoncture favo-rable : une nouvelle étape de la poli-tique de la ville se met en place poursept ans. Des crédits de formation

sont prévus expressément, et des pro-grammations vont s’ouvrir dans cecadre. Le mouvement est donc favo-rable pour généraliser les efforts deprofessionnalisation.

Métiers de médiation et travail social

Les analyses menées jusqu’ici ont étédominées par les rapports entre mé-tiers de médiation et travail social. Ilsemble que ce postulat implicitepuisse être interrogé. Sans nier lesproximités entre les deux champs, n’ya-t-il pas cependant une erreur d’ana-lyse à rabattre ces métiers émergentssur le seul champ et sur le seul mo-dèle de l’action sociale ?

• De fausses similitudes avec les origines du travail social

On peut s’interroger sur les préten-dues similitudes avec les origines dutravail social. La plupart des métierssociaux se sont effectivement consti-tués par professionnalisation d’unbénévolat préalable, mais cela dansun contexte très différent, semble-t-il, de celui qui nous concerne aujour-d’hui.

Les grands métiers installés qui ser-vent de référence (assistant de service

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ÉLISABETH MAUREL – La médiation sociale et culturelle : émergence et professionnalisationdes adultes-relais

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social, éducateur spécialisé…) onttoujours été, dans leur préhistoire,dans leur origine, dans une positionsociale décalée par rapport aux béné-ficiaires. Ils sont issus du bénévolat,certes, mais en aucun cas des milieuxpopulaires auxquels ils s’adressaient.Même si, le temps passant, les ori-gines de ces professionnels se sont dé-mocratisées, globalement, ces métierssociaux se sont toujours positionnéssociologiquement dans une positionéducative vis-à-vis des classes popu-laires.

Historiquement, il s’agissait d’édu-quer la classe populaire et de la faireentrer dans les normes de la sociétéindustrielle. Nous sommes aujour-d’hui dans une problématique quin’est plus tout à fait la même, et quipose d’autres questions, pas plus fa-ciles, pas plus légitimes, mais diffé-rentes. Ces questions renvoient peut-être à d’autres figures que celles dutravail social, pour lesquelles l’appar-tenance au milieu est la premièresource de légitimité, comme parexemple des permanents syndicauxqui acquièrent des qualifications (ju-ridiques, économiques…), mais dontla première légitimité est biend’abord d’appartenir au milieu qu’ilssont censés représenter.

On peut aussi penser, évidemment, àdes démarches en cours dans les paysdits en développement, dont on au-

rait parfois beaucoup à apprendre,comme des équipes travaillant avecdes associations indiennes qui ontbeaucoup appris sur le rôle des lea-ders communautaires en Inde et laformation qu’ils acquièrent.

On a donc affaire à des personnesdont la légitimité est d’être dans lemilieu, mais qui en sont un peu déca-lés, parce que l’on ne peut être mo-teur de changement social qu’en étantà la fois dedans et dehors, ce qui estaussi la situation des femmes-relaisaujourd’hui. On peut aussi évoquer,dans un autre registre, le rôle des bé-névoles d’associations de lutte contrel’alcoolisme ou le sida dans l’aide ap-portée à ces malades par d’anciensmalades. Ce sont des pratiques dontla légitimité est largement confirméeet ne supprime en rien le rôle des pro-fessionnels de santé.

La compétence due à l’appartenanceau milieu renvoie donc à diverses fi-gures spécifiques et elle paraît être unpôle spécifique de légitimité. Cemouvement va s’élargir, dans la me-sure où se développent des pratiquesde participation active des personnesen difficulté, des pratiques de « faireavec » ou « agir ensemble ». Lorsqueces méthodes sont prises au sérieux,c’est-à-dire lorsque l’on reconnaîtvraiment la compétence des per-sonnes en difficulté, le savoir qu’ellesont sur leur propre situation, on sus-

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

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cite parmi elles des gens de plus enplus impliqués, voire des leaders, quidemandent effectivement, au boutd’un certain temps, que l’on recon-naisse leurs compétences et quecelles-ci soient rendues transférablessur le marché du travail.

• Est-on vraiment dans le champ de l’action sociale ?

Cette question ne peut être dévelop-pée sans nous entraîner trop loindans une analyse aujourd’hui tout àfait ouverte sur la nature même duchamp de l’action sociale. Mais onpourrait tout aussi bien parler,comme le fait le rapport Brévan-Pi-card, du champ de la « gestion des es-paces publics ». On pourrait aussi rat-tacher les métiers de la médiation auxmétiers de la ville, aux métiers de lacommunication, aux métiers éduca-tifs, etc.

• Ne pas s’inscrire dans une hiérarchisation du travail social

Raisonner en ces termes peut aider àse prémunir contre une tentation er-ronée : celle d’inscrire les métiers re-lais en position subalterne, en boutde chaîne dans la division du travailau sein de l’intervention sociale.

La coproduction des savoirs posi-tionne les métiers de proximité noncomme de simples adjuvants de boutde chaîne dans une organisation hié-rarchisée et taylorisée du travail so-cial, mais comme un pôle d’équilibredans la régulation sociale, qui doitpouvoir s’appuyer à la fois sur le pôleinstitutionnel et sur le pôle intermé-diaire de la médiation, avec chacunleur légitimité. Il faut donc concevoirles fonctions de médiation commedes métiers propres, et non commedes métiers auxiliaires du travail so-cial, comme du « sous-travail social ».

Il s’agit moins de concevoir unechaîne hiérarchique de l’interventionsociale que de conjuguer légitimités,savoirs et compétences complémen-taires. Ces fonctions ne sont pas despalliatifs des dysfonctionnementsinstitutionnels, elles ne sont pas à re-garder sous un seul mode instrumen-tal d’amélioration des institutions,mais comme un mode de prise encharge d’autres enjeux.

Refuser la fragmentation des diplômes

Il faut penser une qualification arti-culée sur cette légitimité de proxi-mité et sur les savoirs sociaux qui endécoulent qui puisse couvrir un en-semble de fonctions entre lesquellesles personnes pourraient évoluer de

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ÉLISABETH MAUREL – La médiation sociale et culturelle : émergence et professionnalisationdes adultes-relais

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manière à ne pas être enfermées à viedans un quartier et dans un rôle defemmes-relais.

On a dit que les métiers de proximitése développaient dans différentschamps : animation territoriale, in-sertion, éducation, culturel, accès auxdroits, etc. Il faut penser une qualifi-cation qui englobe l’ensemble desfonctions de proximité et de média-tion, et ne pas reconduire l’erreurhistorique qui a fractionné le champde l’action sociale en quelque vingtou trente diplôme différents. Ce se-rait une erreur que de se précipiterdans la création d’une multitude depetits diplômes spécifiques (femmes-relais, aides éducateurs…) qui se-raient enfermants et ne contribue-raient pas à faire émerger la vraie di-

mension de ce qui est en train denaître.

Il faut enfin approfondir la réflexionsur les liens entre professionnalisa-tion et institutionnalisation. La qua-lification met en jeu la reconnais-sance des compétences, des utilitéssociales, et permet leur transférabi-lité. Elle ne dit rien, en soi, sur lesconditions d’exercice et l’encadre-ment institutionnel, autre élémentde la professionnalisation.

Le cadre associatif semble aujour-d’hui le plus approprié pour le déve-loppement de ces fonctions, mais onne peut en faire un absolu. Sansdoute faut-il approfondir la réflexionsur les nouveaux cadres institution-nels possibles.

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

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PEU à peu, en faisant face auxsituations, les femmes-relaisont acquis des façons de faire

spécifiques. Pour résoudre les pro-blèmes auxquels elles sont confron-tées elles ont, peut-être, puisé dansdes engagements militants, dansleurs expériences familiales ou pro-fessionnelles antérieures. Mais ellesont certainement aussi innové, tâ-tonné, fait des erreurs, expérimentédes voies et des positions diversesavant de parvenir à définir empiri-quement des manières de faire quiont été jugées efficaces et pertinentes.Elles ont ainsi acquis une compé-tence particulière, née de l’expé-rience, dont la légitimité commenceà être admise. On fait appel à elles etelles commencent à le faire savoir.

Reconnues sur le terrain, commepersonnes ou comme membres d’uncollectif, par les populations ou lesinstitutions qui savent les trouver encas de besoin, elles sont également deplus en plus visibles sur la scène pro-fessionnelle.

Aujourd’hui, on est, sans doute, entrain d’assister à la professionnalisa-tion du groupe des femmes-relais.On admet que leurs activités ne doi-vent pas relever du bénévolat ou dumilitantisme. On peut, de ce fait, sedemander si les fonctions desfemmes-relais ne commencent pas à

Des savoirs de l’expérience au métier : l’exemple des femmes-relais

Élisabeth Dugué, ingénieur de recherche en sociologie du travail,

CNAM, rattachée au GRIOT1

1. Groupe de recherches interdisciplinaires surles organisations et le travail, CNAM.

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être considérées comme un métier, cequi va bien au-delà de la rémunéra-tion des activités qu’elles assument.Avoir un métier, ce n’est pas simple-ment obtenir un salaire en échangede son travail : qui pourrait penserque les « emplois-jeunes », qui pour-tant assurent une rémunération,constituent un métier ? Comme le ré-sume Mireille Dadoy, un métier,« c’est une formation, c’est une carrière,c’est un statut 2 ».

Je reprendrai, dans un ordre diffé-rent, ces trois dimensions du termede «métier », en examinant com-ment, à quelles conditions et avecquelles implications, les savoirs nésde l’expérience des femmes-relaispeuvent participer à la constitutiond’un métier spécifique.

LA QUESTION DU STATUT

Tous les savoirs nés de l’expérience nepermettent pas d’accéder à un statutreconnu et à un salaire. L’exemple desactivités domestiques est le plusbanal. Concernant une activité es-sentiellement tenue par des femmes,comme l’affiche l’intitulé de« femmes-relais », c’est d’ailleurs uneréférence incontournable. On saitbien que les compétences des mèresde famille ne leur donnent pas unstatut socialement fort. L’estime dontelles peuvent être entourées n’est as-

sortie d’une rémunération qu’en casde crise de l’emploi, pour les inciter àse retirer du marché du travail.Toutes les compétences – ce mélangede savoir et de savoir-faire qui permetde répondre aux exigences de l’action– ne donnent pas droit à une qualifi-cation reconnue, ayant valeur sur lemarché du travail.

Le statut auquel accède un grouped’activités et leur place dans la hié-rarchie sociale ne reflètent pas seule-ment la qualité et la complexité dessavoirs nécessaires pour les accom-plir. Ils traduisent aussi la force so-ciale du groupe de ceux (ou de celles)qui assument ces activités. Comme ledisait le sociologue Pierre Naville, lesmétiers «ne sont pas des entités maisdes groupes d’hommes productifs 3 », liéspar des intérêts et une culture com-mune et ayant réussi à faire recon-naître par la société leur technicité etleurs savoirs. Pour que des qualitésou des savoir-faire ne soient pasconsidérés comme naturels, mais ac-quièrent le statut de métier, nécessi-tant savoirs spécifiques et valant ré-munération, il faut que le grouped’hommes et de femmes qui assu-ment ces activités parvienne à lesfaire reconnaître comme socialement

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

2. DADOY Mireille, «Le retour au métier »,Revue des affaires sociales, n° 4, 1989.3. NAVILLE Pierre, Théorie de l’orientation pro-fessionnelle, Paris, Gallimard, 1972.

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utiles. La place qu’occuperont ces ac-tivités dans l’éventail des salaires etdes statuts sociaux dépend d’ailleursdes forces dont dispose ce groupepour se situer dans la concurrencequi l’oppose aux autres groupes pro-fessionnels, tout autant que ducontenu des activités qu’il prend encharge. On sait bien que la forcephysique a longtemps fait partie de laqualification des hommes ouvriers, eta donc compté pour leur rémunéra-tion, alors que les femmes ouvrières,moins bien organisées et moins re-vendicatrices, n’ont pas réussi à fairereconnaître leur habileté manuellequi, étant considérée comme natu-relle, n’était pas prise en compte dansleur salaire.

Ainsi, il n’est pas suffisant que lesfemmes-relais aient acquis savoirs etcompétences dans leurs expériencesmilitantes et bénévoles pour que cessavoirs de l’expérience soient recon-nus comme qualification. L’accès austatut de métier est aussi un combatsocial et politique, pour lequel lesfemmes sont sans doute moins ar-mées que les hommes. La sociétéconsidère toujours comme «natu-relles » les qualités des femmes, etbeaucoup des savoir-faire desfemmes-relais – accueillir, responsa-biliser, jouer un rôle médiateur, apai-ser les tensions – sont des compé-tences supposées propres auxfemmes, dont elles disposeraient par

nature, et qui, faute de revendicationspécifique, valent ce que valent lesqualités propres aux femmes : l’es-time certes, mais pas la reconnais-sance statutaire.

De quels points d’appui disposent lesfemmes-relais pour que les savoirsqu’elles ont acquis par leur expé-rience soient statutairement recon-nus ? Il faut d’abord noter que, sur cepoint, elles sont loin d’être des pion-nières. Dans un autre contexte, avecd’autres appuis et un autre arrière-plan idéologique, elles réactivent lemouvement qui constitue en perma-nence le travail social. Celui-ci s’est,en effet, construit à partir de l’insti-tutionnalisation et de la reconnais-sance des savoirs nés de l’expérience.De nombreuses études historiquesont montré comment des activitésprivées, relevant à l’origine du béné-volat ou du militantisme, ont peu àpeu accédé au statut d’activités pro-fessionnelles. Dans ce mouvement deconstruction des métiers du social,deux processus se combinent. Lesfonctions d’aide et d’assistance sor-tent de l’ordre du privé et du naturelpour devenir la spécialité de certains,reconnus et rémunérés comme tels.Dans le même temps, on définit eton rationalise les activités, on admetégalement qu’elles nécessitent des sa-voirs, des connaissances particulières.C’est ainsi que, à partir de la fin duXIXe siècle, on assiste à une profes-

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ÉLISABETH DUGUÉ – Des savoirs de l’expérience au métier : l’exemple des femmes-relais

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sionnalisation du social. Ce mouve-ment, qui se concrétise par la nais-sance de la qualification d’assistantesociale, prend alors appui sur la laïci-sation du mouvement religieux, en-tourant la séparation de l’Église et del’État, sur le développement des poli-tiques d’action sociale animées parl’État, mais aussi sur le syndicalismeféminin4.

L’émergence des femmes-relais sesitue dans un tout autre contexte.Elle doit beaucoup aux politiques dela ville qui visent à recréer le lien so-cial dans les quartiers en difficulté ens’appuyant sur les associations, consi-dérées comme « les intermédiaires né-cessaires 5 » entre élus, professionnelset habitants. Ces politiques, qui sedéveloppent dans le contexte de réor-ganisation de l’action sociale lié à ladécentralisation, ont ainsi contribuéà contourner les professionnels dutravail social et à constituer de nou-veaux intervenants sociaux. Certains,comme les chefs de projet qui assu-rent la gestion politique et financièredes nouveaux dispositifs, sont consi-dérés d’emblée comme des profes-sionnels dont le métier doit se struc-turer. Pour d’autres qui prennent encharge, sur le terrain, les relationsavec les populations – et les femmes-relais font partie de cette catégorie –,la reconnaissance statutaire est, pourl’instant, moins établie6. Mais l’appa-rition du nouvel acteur social que re-

présentent les femmes-relais ne s’ex-plique pas seulement par les poli-tiques de la ville ; il faudrait aussi sansdoute chercher des explications ducôté des débats et des positionsconcernant l’intégration des popula-tions d’origine étrangère, des mouve-ments qui ont traversé l’immigrationde première ou de deuxième généra-tion, et des relais et soutiens dont ontbénéficié les protagonistes interve-nant dans cette mouvance.

On peut penser que le développe-ment et l’organisation des activitésdes femmes-relais trouvent là leurdouble origine. L’usage qu’elles fe-ront de ces deux appuis fortifiera ounon la position qu’elles occupent etleur permettra de faire reconnaîtreleurs savoirs et d’asseoir leur statut.

LA QUESTION DE LA FORMATION

La deuxième composante du métierest la formation. En même tempsque des activités accèdent au statut

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

4. RATER-GARCETTE Christine, La Profes-sionnalisation du travail social : action sociale, syn-dicalisme, formation : 1880-1920, Paris, L’Har-mattan, 1996.5. DELARUE Jean-Marie, Banlieues en diffi-culté : la relégation, Paris, Syros, 1991.6. Cf. sur ce point les pages 118 à 120 du rapportde Claude Brévan et Paul Picard, voir bibliogra-phie.

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de métier, se pose la question desconnaissances nécessaires pour les as-sumer. Si certaines activités relèventde l’ordre du professionnel, c’est bienparce qu’elles nécessitent des savoirs,des modes de faire, une technicitéparticulière, dont tous ne peuventpas faire la preuve sans y avoir étépréparés. Il est donc nécessaire demettre en place des procédures de ca-pitalisation et de transmission de cessavoirs professionnels, et pour cela ilconvient de définir les connaissancescaractéristiques du métier. Organisa-tion de la formation et définition dumétier sont donc deux faces de lamême question. C’est particulière-ment vrai pour les professions régle-mentées, auxquelles les assistantes so-ciales sont souvent assimilées : l’accèsaux activités est alors soumis à la pos-session d’un diplôme. En France, cetaspect organisateur de la formationn’est pas réservé aux seules profes-sions : pour des raisons historiques, laséparation entre l’acquisition etl’usage des savoirs professionnels,entre l’école et le lieu de travail, y aété radicale. Le diplôme, qui valide etreconnaît la compétence profession-nelle, a été le grand organisateur desmétiers, même pour des activités quine relèvent pas de l’ordre des profes-sions à statut.

La formation est donc une compo-sante incontournable de la reconnais-sance des femmes-relais. Mais com-

ment la formation peut-elle se situerpar rapport aux savoirs que cesfemmes ont acquis grâce à leur expé-rience pratique ? Comment doit-elleles reconnaître ? Comment doit-elleles dépasser et leur donner sens ? L’ex-périence acquise « sur le tas » fait l’ob-jet aujourd’hui d’un engouement gé-néral qui devrait déboucher, dans lesocial comme dans d’autres secteursprofessionnels, sur la mise en placede la VAE – validation des acquis del’expérience –, permettant l’obten-tion de tout ou partie d’un diplôme.Toute la question étant alors, pourles activités qui accèdent au statut demétier, de définir les bornes du pro-fessionnel.

Mais la formation doit aussi per-mettre d’élargir, d’assouplir, de boni-fier les savoirs empiriques, emmaga-sinés au cours des expériences. Touteexpérience n’est pas formatrice. Ilexiste des pratiques « impulsives 7 »,c’est-à-dire des réponses immédiatesaux situations, non réfléchies et nonmaîtrisées. Dans ce cas, dit GastonMialaret, la pratique ne permetaucun apprentissage. D’autres pra-tiques peuvent être sclérosantes,lorsque, sans tenir compte des trans-formations que subit l’environne-

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ÉLISABETH DUGUÉ – Des savoirs de l’expérience au métier : l’exemple des femmes-relais

7. MIALARET Gaston, « Savoirs théoriques, sa-voirs scientifiques et savoirs d’action en éduca-tion», in Jean-Marie Barbier (dir.), Savoirs théo-riques et savoirs d’action, Paris, PUF, 1998.

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ment, on se contente de répéter àl’identique un comportement ayantfait ses preuves dans une situationdonnée. La pratique n’est enrichis-sante et formatrice qu’à condition dereposer en permanence sur la re-cherche de solutions originales auxsituations rencontrées. Et c’est biensur ce point que l’articulation entreexpérience pratique et formationprend tout son sens. La formationdoit permettre de relier les savoirsissus de l’expérience à des théories etdes savoirs plus généraux ; elle doitainsi déstabiliser les pratiques impul-sives ou sclérosantes et favoriser l’en-richissement, l’assouplissement et lacritique des savoirs empiriques issusde l’expérience.

Là aussi, le rappel de la tradition dutravail social peut être éclairant, lesfemmes-relais se situant à la fois encontinuité et en rupture avec cellesqui les ont précédées. L’organisationdes formations au travail social, toutentière conçue autour de l’alter-nance, vise à l’intégration entrethéorie et pratique, entre savoirsscientifiques et savoirs de l’action.L’expérience des centres de forma-tion au travail social ayant mis cettepréoccupation au cœur de leur pra-tique pédagogique devrait être unappui.

La culture de l’alternance propre autravail social ne relève pas seulement

d’une technique pédagogique. Ellepermet une articulation complexeentre les pratiques d’action sociale etles théories qui les éclairent maisaussi les orientent. Les enjeux sous-tendant l’organisation de la forma-tion des femmes-relais peuvent êtreéclairés par l’exemple des assistantessociales. La professionnalisation decelles-ci s’est accomplie grâce à undouble mouvement d’organisationpar l’État et de détachement des as-sociations caritatives qui ont été àl’origine des premières activités d’as-sistance. La création du diplômed’État et l’homogénéisation descontenus de formation ont accom-pagné l’institutionnalisation des in-terventions et l’uniformisation desparticularismes idéologiques. Les in-terventions des assistantes sociales sesont inscrites à la fois dans les direc-tives réglementaires, définies parl’État, et dans les référents théo-riques et idéologiques, transmis parla formation. L’organisation natio-nale de la formation a participé à ladéfinition d’une culture communeservant de base à la cohérence deleurs interventions. Elle a été un élé-ment favorisant la construction dela déontologie professionnelle etl’acceptation de règles du métier ad-mises par l’ensemble du groupe pro-fessionnel.

Si l’organisation de la formationcontribue à constituer un métier de

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femmes-relais, comment s’effectuerale va-et-vient entre la diversité despratiques ou des expériences et laconstitution d’un corps de connais-sances et de théories leur donnantsens et les structurant ? Si l’on sesitue dans la continuité du mouve-ment qui vient d’être décrit, cela si-gnifierait sans doute l’homogénéisa-tion des pratiques, l’émergenced’une culture commune profession-nelle. Celle-ci se constituerait enpropre, et ne serait directement sou-mise ni aux directives des politiques(politique d’État ou politique lo-cale), ni aux valeurs et aux idéolo-gies propres à un mouvement asso-ciatif ou politique.

Mais la société d’aujourd’hui n’estpas celle des années soixante-dix,qui a vu se constituer le groupe desmétiers du social autour d’un projetde société unifiant. L’État avait alorsun rôle d’organisateur, d’« institu-teur du social 8 » encore légitime ; ildisposait, en particulier, de moyenspour mener à bien l’homogénéisa-tion des métiers via la formationinitiale. La situation est aujourd’huidifférente à plusieurs égards. La re-vendication des particularismes, lesouci d’ancrage dans le local et lespécifique vont de pair avec un effa-cement de l’État ou plutôt avec unemultiplication des acteurs publicsayant pouvoir d’organisation. Entrela Direction de l’action sociale, les

différentes délégations interministé-rielles (à la ville, à la famille, à l’in-sertion des jeunes), les collectivitésterritoriales, les impulsions sontmultiples et l’on peine à trouver oùs’organise et se définit l’action so-ciale et, partant, qui a légitimitépour structurer les métiers du social.

Les activités de médiation n’ont pasencore trouvé leurs théories et leursconcepts de référence, permettant àla fois de donner sens aux savoirsnés de l’expérience et de guider lesmodes d’intervention. Les grandstypes de connaissances communesaux professionnels, les disciplinesscientifiques à mobiliser ne sont pasencore bien définis. C’est sans doutela marque d’une professionnalisa-tion encore à construire. Mais onpeut y voir aussi le signe d’unemoindre capacité homogénéisantede la société. Il semble que l’attache-ment des femmes-relais aux associa-tions qui ont contribué à définirleurs fonctions, leur rôle, leur moded’intervention et leur positionne-ment social, soit puissant. Peut-êtrefaut-il voir dans cette revendicationd’appartenance associative l’effet dumouvement de la société qui pousseaujourd’hui au morcellement et auparticularisme.

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ÉLISABETH DUGUÉ – Des savoirs de l’expérience au métier : l’exemple des femmes-relais

8. ROSANVALLON Pierre, L’État en France de1789 à nos jours, Paris, Le Seuil, 1990.

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LA QUESTION DE LA CARRIÈRE

La professionnalisation des femmes-relais pose la question des carrièresqui leur sont ouvertes, et c’est dans lechamp professionnel du social queles possibilités d’évolution doiventêtre cherchées. Ce champ s’estconstruit par un double mouvementde « segmentation des qualifications et[d’]inclusion dans un ensemble uni-taire 9 ». Les diplômes et les forma-tions du travail social divisent et rap-prochent. D’un côté, ils divisent endéfinissant les frontières des diffé-rents métiers du social. La spécialisa-tion des modes d’intervention, etdonc des savoirs et des compétences,fractionne le champ professionnel ende multiples qualifications. D’unautre côté, l’organisation de l’actionsociale réunit, autour de l’animationd’un ensemble de structures et dedispositifs, un groupe de profession-nels répondant à un projet de sociétéidentique. Les diplômes marquentdonc l’appartenance de ces différentsmétiers à une même communauté :celle des « travailleurs sociaux ». L’in-tégration de nouvelles fonctions élar-git les frontières du champ profes-sionnel au fur et à mesure de l’appa-rition de nouveaux besoins ou denouvelles formes de prise en charge.

Dans ce champ professionnel, laquestion de la professionnalisation et

de la carrière possible, via la recon-naissance des savoirs nés de l’expé-rience, doit être mise en relation avecdeux constats.

Pour l’instant, l’ensemble des profes-sionnels du travail social est plus oumoins organisé en trois grandsgroupes, administrativement recon-nus : les métiers d’aide et d’assistance,ceux de l’éducation et ceux de l’ani-mation. Pour des raisons qui tien-nent à l’histoire et aux rapports deforces, la reconnaissance des savoirsnés de l’expérience est très différentedans ces trois familles d’emploi.Dans les métiers de l’assistance, la ré-glementation du titre d’assistant so-cial, qui réserve certaines activitésaux titulaires du diplôme d’État, jouele rôle de verrou ; elle interdit la re-connaissance des acquis profession-nels et donc la constitution d’une fi-lière promotionnelle. Chez les éduca-teurs, au contraire, la reconnaissancedes acquis de l’expérience permet à lafois d’accompagner des parcours pro-motionnels à l’intérieur de la filière etd’intégrer dans le métier des « faisantfonction», c’est-à-dire des personnesnon diplômées. Cette différence fon-damentale explique que, dans les

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

9. SOULET Marc-Henry, « Formation, qualifi-cation et emploi dans le secteur social », inMarc-Henry Soulet (dir.), Les Transformationsdes métiers du social, Fribourg, Éditions universi-taires, 1997.

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deux familles de métiers, les trajec-toires professionnelles, les modes derecrutement et les origines socialessoient différents.

Par ailleurs, cette organisation en fi-lières techniques est actuellementpartiellement mise à mal par l’appa-rition d’autres figures profession-nelles. Depuis la crise de l’emploi etla décentralisation, une partie de lagestion des problèmes sociaux a étédérivée vers des dispositifs différentsde ceux à partir desquels s’était struc-turé le travail social. Les femmes-re-lais, partiellement nées, on l’a vu, despolitiques de la ville, se situent dansla mouvance de ces nouveaux dispo-sitifs, souvent dits d’« interventionsociale ». La structuration des em-plois et des activités nés de ces dispo-sitifs est loin d’être lisible. Certainesanalyses évoquent une possibilité deréorganisation de l’ensemble du so-cial qui, dans l’hypothèse la plus au-dacieuse, pourrait affecter les trois fi-lières techniques précédemment ci-tées. Ainsi, il a été proposé de distin-guer trois grands types de métiers ;ceux de l’organisation sociale, qui gè-rent, coordonnent et organisent lesdispositifs, ceux de l’intervention so-ciale, qui font les diagnostics et trai-tent les problèmes des individus oudes groupes ; ceux, enfin, dits de pré-sence sociale, qui pratiquent un ac-cueil « sans procédure, sans prescriptionet sans résolution de problèmes 10 ».

Dans ce contexte, trois voies diffé-rentes s’ouvrent aux femmes-relaispour tenter de mener une carrièredans le social en faisant reconnaîtreleurs savoirs pratiques.

La reconnaissance des savoirs de l’ex-périence peut s’effectuer, au coup parcoup, là où les validations sont pos-sibles dans les métiers existants. Lafacilité de reconnaissance des acquisprofessionnels dans les métiers del’éducation pourrait inciter certainesdes femmes-relais à des stratégies in-dividuelles d’intégration dans la fi-lière éducative, traditionnellementouverte à l’assimilation des non-di-plômés. Les femmes-relais s’insére-raient ainsi dans le champ profes-sionnel où elles auraient les mêmespossibilités d’évolution que d’autres,mais l’ouverture des carrières se feraitau détriment de la constitution d’ungroupe professionnel.

La reconnaissance des savoirs desfemmes-relais peut, au contraire, êtrepensée de façon plus collective, avecune intégration de leur groupe dansla structuration existante. Mais deuxvoies bien différentes sont actuelle-ment envisageables.

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ÉLISABETH DUGUÉ – Des savoirs de l’expérience au métier : l’exemple des femmes-relais

10. GREFOSS, «Esquisse de typologie de troisemplois types », in Actes du séminaire des jour-nées du 10 et 11 juin 1997 au Croisic, MIRE,1997.

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Une première voie peut consister àintégrer collectivement les femmes-relais dans la structuration existante.C’est l’option ouverte par la préfor-mation pour les médiatrices sociocul-turelles proposée par l’IRTS-Paris,avec le soutien de la DRASSIF11 et dela DPM. Cette formation a undouble objectif : donner un métieraux femmes-relais et assurer l’entréedérogatoire dans la formation au mé-tier d’assistante sociale. Elle peut ap-paraître ainsi poser les prémicesd’une filière de l’assistance, dont laqualification de femmes-relaisconstituerait le premier étage, actuel-lement manquant. On pourrait assis-ter alors, à l’intérieur des métiers del’assistance, à une reconnaissance col-lective des savoirs détenus par lesfemmes-relais. Mais on pourrait àl’inverse y voir le risque d’un écrase-ment du groupe, avec une faible priseen compte de ses spécificités et de sesapports à l’intérieur des probléma-tiques du social.

Une autre voie de reconnaissance col-lective des fonctions des femmes-re-lais aurait des conséquences plus radi-cales. Leur professionnalisation pour-rait accompagner la recompositiondu groupe des professionnels du so-cial. Selon certains, les activités defemmes-relais se situent, en effet, à lajonction des différents modes d’inter-vention cristallisés dans les trois fi-lières techniques (assistance, éduca-

tion, animation) qui structurent lechamp du travail social. Du fait deleur proximité avec les populationsd’origine étrangère, de leur façon spé-cifique de penser le lien social, lesfemmes-relais renouvellent les modesd’intervention. La reconnaissance dessavoirs multiples qu’elles détiennentpourrait être le premier pas vers unereconnaissances des métiers de pré-sence sociale, évoqués plus haut, cequi porterait en germe la possibilitéd’une refonte des filières, voire d’unerévision des fondements de l’actionsociale. C’est l’option ouverte par laformation mise en place par l’IRTS-Paris et Profession Banlieue, avec lesoutien de la Délégation aux droitsdes femmes. Cette formation, qui al’objectif de faire de la fonction defemme-relais une qualification et unmétier, voudrait permettre son évolu-tion ultérieure au sein des trois filièresdu travail social ; elle entend égale-ment favoriser l’émergence de la priseen compte du fait culturel dans l’in-tervention sociale.

En effet, la question des carrières ou-vertes aux femmes-relais ne concernepas seulement les possibilités d’évolu-tion professionnelle offertes aux indi-vidus. Le problème est aussi de pen-ser la professionnalisation de nou-

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

11. DRASSIF : Direction régionale des affairessanitaires et sociales d’Île-de-France.

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veaux acteurs du social et leur ins-cription à l’intérieur des carrièressans écraser les savoirs acquis sur leterrain, sans laminer une culturecommune en train de se constituer.Les femmes-relais sont nées, on l’adit, de problématiques et de disposi-tifs différents de ceux qui ont struc-turé les fonctions et les modes d’in-tervention des assistantes sociales.Les relations entre les deux groupessont compliquées, faites à la fois deconcurrence, d’opposition, de com-plémentarité et d’instrumentalisationréciproque. On peut voir, dans cetterelation ambiguë, le reflet de l’inté-gration des femmes-relais dans legroupe des travailleurs sociaux :comme tous les groupes profession-nels en constitution, elles tenteraientde se situer dans un ensemble tout ense démarquant des groupes concur-rents. Mais on peut voir aussi, dansles critiques que les femmes-relaisadressent aux assistantes sociales, unedemande de refondation des bases del’intervention sociale.

Pour penser la carrière des femmes-relais, il faut envisager la façon dontles savoirs qu’elles détiennent s’ins-crivent dans les modes d’action insti-tués par les autres métiers et forma-tions du social : les bousculent-ils etcomment, quels sont les points d’ac-cord et de désaccord, de complémen-tarité et d’opposition entre les inter-ventions des femmes-relais et celles

des autres professionnels du travailsocial ? Le fait que la préformationexpérimentale assurée par l’IRTS-Paris avec le soutien de la DRASSIFn’ait pas été reconduite peut être in-terprété comme la conséquence destensions entre ces différentes lo-giques. Le rapport d’évaluation de laformation est d’ailleurs largementconsacré à l’analyse de ces tensions12.

***

Il existe, dans le secteur social, unlarge consensus sur la nécessité de re-nouveler les problématiques concer-nant l’action sociale. Les politiquesd’insertion recomposant l’ensembledes systèmes de droits et de devoirssur lesquels s’appuie le travail social,le développement de l’immigrationfamiliale entraînant la transforma-tion des conceptions présidant àl’installation des étrangers dans la so-ciété française, l’évolution des modesde relation entre les élus, les habi-tants et les travailleurs sociaux, toutcela met en cause les différentes théo-ries à partir desquelles ont été pensésà la fois le lien social et les formes tra-ditionnelles de l’action sociale. Lessavoirs nés de l’expérience peuventpermettre de renouveler les théories

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12. DONNARD Christine, GOSSELIN Jo-sette, Évaluation de la préformation expérimentalepour les médiatrices socioculturelles ou femmes-re-lais, rapport établi pour la DRASSIF, 2000.

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si les façons de faire sont en ruptureavec les pratiques instituées et si legroupe porteur de ces nouveaux sa-voirs réussit à s’imposer dans lechamp professionnel.

Poser la question de la reconnais-sance d’un métier de femme-relais,c’est aussi se demander si la naissancede leur groupe s’inscrit dans un re-nouvellement des pratiques d’actionsociale, et si ce renouvellement peutcontribuer à faire émerger des pro-blématiques et des conceptions nou-velles qui guideront l’action sociale.

On doit constater que la reconnais-sance, actuellement en débat, d’unmétier de la médiation – qu’on lenomme adulte-relais, médiateur so-cial ou médiateur socioculturel –semble aujourd’hui dépendre essen-tiellement de l’état du rapport deforces entre les différents acteurs par-ticipant à la régulation de la relationentre emploi et formation. On peutregretter l’absence de lieu où puissentêtre débattues et surtout arbitrées lesquestions proprement politiquesauxquelles renvoie l’émergence dugroupe des femmes-relais.

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Profession Banlieue – Référentiel femmes-relais

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PROFESSION BANLIEUE, La Médiation sociale et culturelle : enjeux professionnelset politiques. L’exemple des femmes-relais, promotrices de l’intégration des migrants,Saint-Denis, Profession Banlieue, 2001 (Coll. Les Rencontres de Profession Ban-lieue).

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MÉDIATION SOCIALEQuelques publications de Profession Banlieue

En plus du référentiel femmes-relais, Profession Banlieue a consacré quatre publications à laquestion des femmes-relais. Ces documents montrent l’état de l’avancement des réflexions surce nouveau métier qui interroge les politiques sociales, notamment au sein des quartiers, et lespolitiques d’intégration.

Professionnaliser la médiation sociale : pour un statut des femmes-relais(1997) (100 F - 15 €), 154 pagesRencontre de Profession Banlieue, 1er juillet 1997, Saint-DenisAUTÈS Michel, AYMA Renée, BLIN Christiane, CUNHA Maria, LAPORTE Catherine,MADELIN Bénédicte, MARCHAND Claude, MARILLER Noëlle, PINAULDT Marc-Étienne

Cette journée a permis la mise en débat du référentiel élaboré par le groupe de travailde Profession Banlieue. L’objet de cette journée était de faire avancer le débat autour detrois questions :1. la reconnaissance, voire le statut des femmes-relais, comme nouveau métier issu desquartiers et de la politique de développement social urbain ;2. la professionnalisation des femmes-relais et sa compatibilité avec la notion de proxi-mité auprès des personnes les plus en difficulté ;3. le développement des associations de femmes-relais et la restructuration des métiersdu travail social.

Femmes-relais : quelle place dans l’intervention sociale? (1999, édité en 2000)(120 F - 18,50 €), 90 pages et annexesRencontre de Profession Banlieue, 16 novembre 1999, Saint-Denis, en collaboration avecl’Institut régional de travail social (IRTS) de Paris et l’ArifaBLANCHARD Marie-Madeleine, BOUVIER Thérèse, CARTON Luc, DAL VERME Sa-bina, FAYMAN Sonia, HASSAN Marie-Hélène, JUSTON Martine, LE LAY Thierry,LOUDHINI Christine, MADELIN Bénédicte, MAUREL Élisabeth, NEVEU Catherine,TOPUZ Bernard, ZARKA Jacqueline

Différentes contributions ont souligné l’enjeu de la professionnalisation des femmes-re-lais et de leur place dans l’intervention sociale. Les questions de l’appartenance territo-riale, de l’appartenance communautaire ou ethnique, du genre (hommes/femmes) et dela déontologie professionnelle ont structuré la réflexion.Une recherche-action a été menée en Seine-Saint-Denis sur la perception des femmes-re-lais par les usagers et les responsables institutionnels de Seine-Saint-Denis. Les résultatsconfortent les femmes-relais dans leur rôle d’appui pour les transformations nécessaires duservice public et de lien permettant aux habitants de s’inscrire dans une dynamique sociale.

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Le travail de médiation dans les quartiers populaires : regards des institutions(1998, rééd. 2000) (60 F - 9 €), 86 pages

CUNHA Maria

Ce rapport réalisé par la sociologue Maria Cunha évalue les apports des femmes-relaisde Montfermeil (association Arifa) aux institutions, et l’utilisation de ces médiatrices parles intervenants sociaux, sanitaires et éducatifs. Les pratiques professionnelles desfemmes-relais sont analysées au regard des représentations portées par les agents surces médiatrices.

La médiation sociale et culturelle : enjeux professionnels et politiques.L’exemple des femmes-relais, promotrices de l’intégration des migrants(2000, édité en 2001) (120 F - 18,50 €), 120 pagesColloque européen, 26-27 juin 2000, ParisAUTÈS Michel, BASTERA Isabel, CARTON Luc, CORNIL Jean, DUGUÉ Élisabeth,GAEREMYNCK Jean, GOELABDIEN R.A.R., GRANDJEAN Carole, KRIECHHAM-MER YAGMUR Sabine, LAZAAR Latifa, MADONI Patrizia, RÉA Andréa

Depuis plus d’une dizaine d’années, les différents pays européens sont interpellés parl’émergence de multiples formes de médiation qui interrogent autant les modalités de l’in-tervention sociale que les modèles nationaux d’intégration. Mais de nombreuses questionsrestent posées aux décideurs des différents pays européens. En quoi l’émergence de cesmétiers urbains interroge-t-elle les fonctions traditionnelles ? Comment les institutionspubliques peuvent-elles intégrer et s’enrichir des formes d’intervention des femmes-relaispour transformer leurs propres pratiques ? Les actions des femmes-relais sont-elles unélément du renouveau des politiques sociales et des politiques d’intégration?

MAIS AUSSI… Profession Banlieue a eu l’occasion de travailler sur le thème du ra-cisme et des discriminations.

Quelles initiatives contre le racisme «ordinaire»? (1998) (80 F - 9 €), 192 pagesAUFFRET Dominique, BATAILLE Philippe, BÉHAR Daniel, CALLE Gérard, CHAUMERON Jean-Christophe,DUPREZ Dominique, MADELIN Bénédicte, MAGUER Annie, POIRET Christian, SAUCEY Catherine,STREIFF-FENART Jocelyne, TIMERA Mahamet, TOUBON Jean-Claude, VOURC’H François

L’accent de cette journée a été mis sur la nécessité d’identifier et de nommer le fait raciste, surl’enjeu de la catégorisation et de ses implications dans la lutte contre le racisme. Le problème aété abordé sous l’angle de l’accès au logement et de l’accueil dans les services publics.

Discrimination et emploi : repérer et agir (2001) (90 F - 13,50 €), 150 pagesBENYACHI Ahmed, formateur-consultant (IFAR, Institut de formation de travailleurs sociaux, Lille), BOU-RASSET Laurent, formateur (Olympio), JÉRABEK Luc, Directeur de la mission locale d’Aulnay-sous-Bois,MARTY Étienne, chargé de la coordination du 114, LATRAVERSE Sophie, juriste (GELD), PIOT Isabelle, char-gée de mission (ASPECT), SIMON Patrick, chercheur (INED) et membre du Conseil d’orientation du GELD

Comment comprendre l’émergence de la thématique des discriminations, qui vient supplantercelle de l’intégration ? Comment lutter contre la discrimination dans le monde du travail ? Desdispositifs d’intervention, les nouvelles orientations européennes, le travail de réseau sontquelques-uns des outils présentés dans ce Cahier.

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centre de ressources pour les profes-sionnels de la politique de la ville enSeine-Saint-Denis, a été créé en no-vembre 1993 suite aux travaux prépa-ratoires à l’élaboration des contrats deville de Seine-Saint-Denis. Ces étudesmettaient en évidence le besoin d’unlieu d’échange, de rencontre, deconfrontation, de qualification pourles professionnels.

Cette notion de professionnalisationfaisait dans le même temps l’objetd’une étude menée par une équiped’universitaires, Les Professionnels et laprofessionnalisation en banlieue, étuderéalisée pour le compte du ministèrede l’Enseignement supérieur et duministère de l’Équipement, des Trans-ports et du Tourisme.

Profession Banlieue est une associa-tion et tient une place particulièreparmi l’ensemble des acteurs de lapolitique de la ville. L’association tra-vaille avec des partenaires aussi diversque les représentants de l’État ou descollectivités territoriales, des chefs deprojet, des bailleurs sociaux ou desentreprises, les chambres consulairesou des associations. Le statut associa-tif donne au centre de ressources uneposition de neutralité qui s’inscritdans l’objectif de qualification et deprofessionnalisation de l’ensembledes intervenants du développementsocial urbain.

Pour atteindre cet objectif, ProfessionBanlieue s’appuie sur des éléments denature différente :

Une méthode : la mise en synergie descompétences locales et des chercheurs.Un comité scientifique suit les travauxde l’association et permet aux profes-sionnels de confronter projets et ac-tions à l’état de la recherche en matièrede développement social urbain.

Un ancrage territorial : l’inscriptiongéographique de Profession Banlieueen Seine-Saint-Denis, un départe-ment qui présente des caractéristiquesfortes liées à son histoire politique,économique, sociale. Cette positionspécifique contraste avec l’ensemblede l’Île-de-France, l’une des premièresmétropoles internationales.

Une conviction : la mise en réseau desprofessionnels de la politique de laville comme outil de transformationdes logiques d’acteurs. L’échange d’ex-périences, la confrontation des savoir-faire, le débat avec la recherche favori-sent la qualification, la professionnali-sation des opérateurs.

Un consensus et une volonté pour tra-vailler autrement : l’adhésion des par-ticipants. Les différentes instances detravail organisées par Profession Ban-lieue se sont toujours constituées surle volontariat des professionnels : ellesne sont pas imposées par les hiérar-chies institutionnelles, même si cesdernières valident ou « cautionnent »la participation de leurs salariés à cesinstances de travail.

Profession Banlieue,

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Retirage mars 2003.Maquette : Claire Péraro

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RÉFÉRENTIEL FEMMES-RELAIS

Tél. : 01 48 09 26 36

Fax : 01 48 20 73 88

E-mail : [email protected]

15, rue Catulienne - 93200 Saint-Denis

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